jeudi 9 septembre 2010

Le bonheur est dans le pré


Je suis toute absorbée depuis l'été par de vastes projets de rénovation que je poursuis le plus souvent dans la solitude. J'ai pour toute compagnie un radio récemment acquis et les jeunes employés de la quincaillerie locale.

Ainsi, tous les jours pratiquement, je consacre mes heures libres à cette métamorphose. J'arrache, je peinture, je sable, je teins, je plâtre, je resable, je vernis, je taille, je désherbe et je décape. Rien qui ne m'inspire guère de récit épique. Bien au contraire. Comme si l'occupation des mains engourdissait les sens, amollissait mes facultés cérébrales et endormait mes sentiments d'un naturel pourtant si intense. Je deviens monomaniaque. Arracher de la vieille tapisserie ou des mauvaises herbes m'hypnotisent jusqu'à l'épuisement. Et le lendemain, je recommence.

Mes travaux forcés m'avaient ainsi plongée dans une grisaille quotidienne. L'inspiration m'avait fuie. Jusqu'à cet après-midi chaud et ensoleillé, où le destin et la liste de tâches à accomplir ont concurru pour m'amenée, en robe d'été, dans une voiture louée chargée à craquer de déchêts industriels. En automate de la transformation domicilaire que je suis devenue, suivant les directions indiquées sur internet, mais sans vraiment savoir où je m'en allais, je me trouvai presque soudainement en pleine campagne, à une cinquantaine de kilomètres de la maison, en route pour le dépôtoir municipal, alors qu'une superbe musique de Dvorjak passait à la radio. À ce moment précis et tellement banal, j'ai goûté à la félicité. Peut-être les heures à ramper dans mon entre-toit rempli de poussière toxique a-t-il fini par atteindre mon système nerveux. Ou alors était-ce la satisfaction du travail accompli - ces 15 sacs de pure pollution, ainsi que 20 autres restés derrière, témoignant du labeur effectué à la sueur de mon front. Le soleil me souriait. La musique me transportait. La vie était belle.

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