samedi 30 octobre 2010

Bonjour tristesse, Françoise Sagan (livre # 6)


"Sur ce sentiment inconnu dont l'ennui, la douceur m'obsèdent, j'hésite à appose le nom, le beau nom grave de tristesse. C'est un sentiment si complet, si égoïste que j'en ai presque honte alors que la tristesse m'a toujours paru honorable. Aujourd'hui quelque chose se replie sur moir comme une soie, énervante et douce, et me sépare des autres."

Françoise Sagan. J'ai souvent l'impression que les vies intenses s'éteignent tôt. Je me trompe. Elle est morte à 69 ans après deux mariages et autant de divorces, un enfant, un avortement illégal qui lui fait signer le manifeste des 343 salopes, un premier roman à 18 ans, une vingtaine d'autres qui suivent, de nombreux amants et maîtresses, beaucoup de drogues et d'alcool, des cures de désintoxication, une fascination pour les voitures et la vitesse, un accident grave, un coma, quelques arrestations, un penchant pour le jeu, une condamnation pour fraude fiscale, une fin dans la misère.

Ainsi va son épitaphe composé de son crû :« Sagan, Françoise. Fit son apparition en 1954, avec un mince roman, Bonjour tristesse, qui fut un scandale mondial. Sa disparition, après une vie et une œuvre également agréables et bâclées, ne fut un scandale que pour elle-même. »

L'éternelle adolescence. Elle ne manque pas de me troubler lorsque je la rencontre dans mon entourage. La recherche de sensations fortes m'étourdit. Et je m'éloigne naturellement, non sans demeurée perplexe. Cette quête d'absolu ne me laisse pas indifférente, bien au contraire. Elle m'attire et je m'y brûle chaque fois.

" Leur résignation à ne pas plaire me semblait une infirmité indécente".

jeudi 28 octobre 2010

It's a...!

3 septembre - peu après-midi. Je reviens d'une réunion dans les bureaux du ministre. Un courriel tout simple m'attend avec un nombre impressionnant de pièces jointes. C'est le moment de vérité! Accoucher au bureau, en silence, dans le brouhaha des agendas à remettre aux sous-ministres, des appels à retourner, des mémos à obtenir d'urgence... Le temps s'arrête, alors que la vie autour continue.

Ma patronne entre en coup de vent pour me donner des instructions sur mes tâches à accomplir dans les heures suivantes. Je fais un effort surhumain pour enregistrer ces informations, comme si elles me parvenaient à travers un épais brouillard. Un autre courriel arrive en même temps dans ma boîte de réception personelle. Un courriel pour l'autre Eugénie, celle qui avait la vie d'avant l'accouchement. Un courriel un peu maladroit. Un petit pincement au coeur, que je ressens malgré l'engourdissement qui m'envahit lentement. Il me faudra trouver une réponse, mais pour l'instant les mots qu'il me faudrait trouver sont d'une langue étrangère.

Décrire ce plongeon est impossible. C'est un plongeon presque immobile - tout en douceur. J'apprivoise la photo de mon enfant à venir sur mon écran, mais cet enfant ne bouge pas, ne rit pas, ne joue pas. Je mesure toute la distance qu'il me reste à parcourir pour l'atteindre.

La rencontre de deux destins n'est pas le choc que j'aurais pu croire. J'ai le reste de ma vie devant mes yeux. C'est d'une très grande simplicité. Dans un instant, je suis devenue sa mère. Elle est devenue ma fille.

mardi 26 octobre 2010

Le Chariot (7)


La carte du triomphe et de la certitude. Voilà qui me ramène à Milan, dans un café des Navigli où j'avais une conversation avec une jeune collègue pleine de certitudes justement. Elle avait rencontré son conjoint à l'école secondaire. Ils avaient fait un mariage somptueux. Ils avaient tous deux réussi le concours et allaient partir en poste ensemble. Dans leur courte vie, tout leur avait souri. La réussite et les succès étaient pour elle une évidence. Et c'est lorsqu'elle s'est exclamée "quand c'est le bon, on le sait tout de suite", que j'ai compris que la vie m'avait enseigné une grande leçon. Quelques années auparavent, j'avais eu la certitude moi aussi d'avoir "rencontré le bon" et je m'étais alors là royalement fourvoyée. Une erreur qui m'a très longtemps ébranlée. Et j'ai compris à cet instant que n'eut-je pas vécu cet échec, j'aurais certainement cette arrogance prétentieuse de ceux qui sont armés de leur certitude. Que le doute qui m'habite depuis, s'il me rend plus fragile et vulnérable, me permet également de saisir des nuances qui m'échappaient jusque là; me force à l'humilité, mais m'offre en échange une humanité beaucoup plus riche.

Devant le triomphe et la gloire, je fais l'éloge de l'incertitude! Dans le testament, le passage qui me touche le plus est d'ailleurs celui pendant lequel Jésus, sur le Mont Golgota, prie alors que ses disciples sont endormis et demande "Père, pourquoi m'avez-vous abandonné?". Nul besoin d'être religieux pour reconnaître ce sentiment universel d'abandon et d'isolement devant un deuil, un échec, une difficulté.

samedi 23 octobre 2010

Le Bhagavad Gita (livre # 5)


Voilà des semaines que je procrastine à l'idée de m'attaquer à ce livre... Ce qui me rappelle "Les droits imprescriptibles du lecteur" tirés de Comme un roman de Daniel Pennac.

J'avais 16 ans. J'étais en formation d'anglais à l'université de Sherbrooke et je traversais un été particulièrement difficile de ma vie. En marchant dans un corridor, j'avais apperçu l'affiche publicitaire de ce livre dans la vitrine de la librairie. J'étais entrée demander si je pouvais l'avoir et sans même une hésitation, le libraire me l'avait remise.

L'affiche est restée sur le mur de ma chambre une quinzaine d'années. Jusqu'à ce que je libère ma mère des traces les plus évidentes de ma présence passée dans ces lieux.

J'ai maintenant l'impression d'être concurrente à l'émission "Qui veut être millionnaire?" et de me prémunir d'un de mes atouts. Je commence par le premier : le droit de ne pas lire un livre.

Voici donc les droits imprescriptibles du lecteur, aussi sacrés que les 10 commandements:

1. Le droit de ne pas lire.

2.Le droit de sauter des pages.

3. Le droit de ne pas finir un livre.

4. Le droit de relire.

5. Le droit de lire n'importe quoi.

6. Le droit au bovarysme (maladie textuellement transmissible).

7. Le droit de lire n'importe où.

8. Le droit de grappiller.

9. Le droit de lire à haute voix.

10. Le droit de nous taire.

jeudi 21 octobre 2010

L'attente


27 août - Un mois après l'appel innattendu qui m'annonçait un retournement de situation dans le processus. J'ai un enfant - dans le sens générique du terme.

D'abord un courriel dans lequel l'agence indiquait quelle souhaitait me rejoindre sans préciser la raison, sinon que c'était très important. Ensuite, pendant de longues heures, rien. Est-ce que j'avais un enfant? Un garçon, une fille? Quel âge? Où? Que le silence pour répondre à ces questions qui me hantaient de plus en plus. Au seuil de la folie, j'ai finalement réussi à contacter quelqu'un qui a pu me confirmer qu'on m'avait assigné un enfant, mais que les détails devaient suivre.

J'ai alerté deux pédiatres qui s'étaient engagés à analyser les résultats médicaux, un ami capable de traduire le dossier, la travailleuse sociale responsable d'approuver l'adoption, les services d'immigration pour qu'ils accélèrent des procédures trop lentes... Nous sommes une armée au garde à vous. Mais le général ne vient pas.

Quatre jours plus tard, on me confirme que quelque part, dans les documents du ministère de la Famille, je suis la mère d'un enfant qui existe, qui vit, qui a un nom, un visage, un jouet préféré. Mais qu'il manque un document légal pour permettre à mon intermédiaire d'obtenir ces documents. Une procédure qui pourrait prendre trois semaines.

Pendant ce temps, je serai la mère d'un enfant qui grandit, qui fait des dents, qui dort la nuit, ou non, qui joue avec son jouet préféré, mais dont je ne sais rien.

J'attends.

L'attente, c'est la promesse d'un bonheur si fragile qu'elle craint les mots.

J'ai perdu le goût des rencontres. Je ne trouve plus de refuge que dans le silence intérieur, la musique et le sommeil. L'attente est un exercice solitaire.

J'attends.

Et je savoure plus que jamais le choeur à bouche fermée dans l'opéra Madame Butterfly : en attendant le retour de son amant sur le navire qu'elle voit arriver au large, Madame Butterfly chante un air sans parole. Je vous invite d'ailleurs à l'écouter : http://www.youtube.com/watch?v=Ewu0M5tkvHA&feature=related

L'essence de l'attente si trouve. Tout a di été dit, même si rien n'a été dit.

mardi 19 octobre 2010

L'amoureux (6)


J'aurais tellement voulu parler d'amour, de grands sentiments - mais il semble qu'aucune carte n'y soit consacrée. En plus, l'amoureux au singulier, ça peut être une chose bien triste. Mais étrangement, ce n'est que le tarot de Marseille qui lui réserve ce triste sort. Les anglos le font vivre au pluriel...

Enfin, l'amoureux solitaire. Il faut croire que les cartomanciennes n'aimaient pas les histoires qui se terminaient bien.

C'est peut-être pour cette raison qu'elle annonce un choix déterminant pour l'avenir, des hésitations, une situation instable et ambivalente. Attente et désir.

L'attente, tributaire du désir ou de la peur, parce que sans eux elle n'existe pas. C'est une souffrance extrêmement subtile que d'anticiper une chose que l'on craint ou d'espérer une chose que l'on souhaite. C'est parfois lourd d'avoir le coeur en gestation.

Dans sa plus belle forme artistique, l'attente devient le choeur à bouches fermées de l'opéra Madame Butterfly. Abandonnée enceinte et dans la honte par son amant américain quelques années plus tôt, elle apprend son retour imminent. Ce choeur magnifique entonne doucement cet air d'anticipation, un des préférés de ma mère. Un murmure à peine. Elle regarde la mer qui doit lui ramener le père de son enfant et son amoureux. Toute sa joie est contenue. Le chant reste à l'intérieur. Madame Butterfly, c'est une amoureuse bien solitaire!

samedi 16 octobre 2010

A la hauteur de Grand Central Station, je me suis assise et j'ai pleuré (livre # 4)


"Je souris, mais je suis en extase, car pour moi il n'est d'autre réalité que celle de l'amour."

Je passe en trombe à la grande bibliothèque de Montréal trouver un peu de fraîcheur dans cette canicule de juillet et consulter ce livre pour le moins suprenant. Je n'ai qu'une heure avant de rejoindre un ami pour le déjeuner et je me plonge perplexe dans cette prose poétique à priori confuse. Il y sera question d'extase et d'amour. Un propos qui nous lie vous et moi, très chers lecteurs. Je parcours, pour ne pas dire j'engloutis, la moitié du texte de quelque cent pages avant de l'abandonner sur une table pour mon rendez-vous.

"Ce que tu crois être un chant de sirènes pour t'attirer vers un sort funeste, n'est que la voix de l'inévitable pour t'accueillir après une si longue attente. Je t'étais destinée. Des éternités se sont déroulées, des planètes se sont désintégrées et formées pour amener ces deux êtres ensemble."

Je le retouve à la même place après mon déjeuner, qui m'attend. En consultant la note biographique, je comprends mieux le sous-texte. La passion scandaleuse de l'auteure - originaire d'Ottawa - qui dans les années 1940 prend pour amant un homme marié avec lequel elle aura quatre enfants. Je recommence ma lecture avec lenteur cette fois-ci, maintenant que j'ai tout l'après-midi pour la savourer.

"Peut-être suis-je son avenir? Mais, alors, elle est son présent."

Un homme marié partagé entre deux amours. J'en ai rencontré un récemment, comme on croise un inconnu dans un train. Une femme, une amante, des maîtresses. Et moi comme témoin privilégié.

"C'est elle qui fait circuler mon sang, accomplir leur révolution aux étoiles, et revenir les saisons".

C'est, je crois, mon premier drogué de l'amour. L'enivrement et l'euphorie le tiennent au piège, prisonnier d'une passion qui n'est pas aveugle, mais au contraire spectateur presque impuissant du sabotage de sa vie. A chaque coup de coeur, c'est un Kamikaze qui plonge sur Pearl Harbour.

"Jupiter a aimé Leda, me dis-je, et rien désormais ne peut empêcher la guerre de Troie."

A la fin de son récit, une seule question : et l'amour dans tout ça?

"Je peux porter l'amour comme Saint-Christophe. C'est lourd, mais je peux le porter. Ce sont les roches de la suspicion qui me font trébucher."

jeudi 14 octobre 2010

Et une fois de plus, c'est extase et tourments


Je vous avais promis une année sereine et paisible... J'y crois chaque fois. Et plus ma conviction est solidement ancrée, plus la vie s'acharne à me prendre à tort. Quelques semaines, pas même un mois, après avoir résolu de mener une existence presque oisive pendant l'année qui vient, un appel, que je n'attendais pas, cela va de soi dans ce genre de circonstances, m'a éveillée ce matin pour bouleverser ma vie. Je parle de bouleversement, mais cette notion est encore toute cérébrale - c'est-à-dire que je sais que ma vie est bouleversée, mais je n'en saisi pas encore pleinement la portée.

Nous sommes le 27 juillet. Je sais que cette chronique ne paraîtra de façon presque trompeuse dans la section "temps présent" cet automne, mais je ne peux la publier maintenant. J'ai d'une part toute une série sur l'art qui va bon train présentement et d'autre part, j'ai besoin de digérer dans le secret cette étonnante nouvelle.

Lorsque j'ai entrepris des démarches d'adoption à l'été 2009, on m'avait parlé d'une attente de 5 ans ce qui m'avait mis en mode presque de déni. Je préférais ne pas y penser plutôt que de souffrir de l'impatience innévitable qui accompagne l'attente.

En mai 2010, j'apprenais que j'étais 33ième sur la liste, ce qui réduisait considérablement ce délais à moins de deux ans.

Puis ce matin, pour une raison qu'on ne s'explique pas puisque je suis toujours 33ième sur cette fameuse liste, mon contact auprès de l'agence m'apprend que le comité d'assignation est prêt à recevoir mon dossier!

Je serai mère! Je me prépare depuis des années, et pourtant je suis prise de court. Je ne comprends pas encore ce que ça signifie : en terme de temps d'abord (1 mois, 3 mois, 6 mois), pour mon nouvel emploi qui commence la semaine prochaine, pour mes rénovations entreprises au début du mois et qui devaient se prolonger toute l'année, pour les finances qui avaient été plannifiées sur une période d'une autre année. Je sais que tout va se placer - peu importe ce qui arrive. Mais je sais aussi qu'avec cet appel, ma vie ne sera plus la même. Que le plan, une fois de plus, subit le grand sabotage de la vie!

PS. Au moment de publier, j'en saurai probablement davantage qu'aujourd'hui et je lancerai ma série de chroniques sur l'adoption que je préparais depuis peu...

mardi 12 octobre 2010

Le pape (5)


Cinquième carte: le pape. Comme le pape Borghese et sa famille m'ont inspirée la semaine dernière, voyons où celle-ci me mène. On parle d'abord de protection divine, de religion et de sacré. Voilà qui est plus intéressant. La notion de sacralité.

Qu'est-ce qui est sacré en 2010? J'ai très peu réfléchi à la question. Par définition c'est notamment "ce qui a trait à la religion et a pour objet le culte de dieu". Mais le terme peut aussi s'appliquer à des objet païen - comme le boeuf sacré des Indiens. Cet aspect par contre m'intéresse peu.

J'ai repris récemment la pratique régulière du yoga - et c'est ce qui se rapproche le plus du sacré dans ma vie. Comme le veut la philosophie sous-jacente au yoga : "Mon corps est le temple de mon âme"! Voilà pour ma pratique spirituelle! Je privilégie une approche très peu sportive (pour ceux qui sont familier avec le vaste univers du yoga). J'y ai appris une chose aussi banale que respirer - et ça a fait toute la différence.

Cette carte réfère également à la moralité, mais aussi à la bonté et à la miséricorde. Et je me découvre souvent janséniste, rigide moralement comme une hammish. Je suis d'une rigueur morale que j'avoue être probablement immature. Il m'arrive régulièrement de m'offusquer d'une situation - que mon père, en quelques mots qui débutent généralement par "mais, ma petite Eu...", réussit à remettre en perspective.

samedi 9 octobre 2010

Le meurtre de Roger Ackroyd (livre # 3)


"Nous poursuivons notre tâche dans un dessein déterminé, puis, lorsque celui-ci est réalisé, l'effort quotidien nous manque. Croyez bien, monsieur, que mon travail était intéressant. C'était le travail le plus intéressant de la terre. J'étudiais la nature humaine. - Hercule Poirot."

Ah! Agatha Christie! Ma grande passion littéraire de jeunesse. Mon père, qui habitait boulevard St-Joseph coin Boyer à Montréal, nous amenait le samedi matin faire les bouquinnistes de la rue Mont-Royal. Je me choisissais quelques livres - toujours des Agatha Christie - et la fin de semaine, ou la semaine de vacances étaient réglées. J'avais à l'époque 8 ou 9 ans. Si je me souviens, je partageais cette passion avec quelques vieilles tantes, que soudainement je me prenais à estimer davantage en raison de ce goût raffiné que je leur découvrais. L'estime tient parfois à si peu de chose.

Il y a quelques temps, relisant mes premiers journaux intimes, je suis tombée sur un passage qui me laissa perplexe à la première lecture. J'y écrivais que j'aspirais à enseigner la résolution de problèmes à l'Université. Je reconnaissais mon ambition, mais restais dubitative retrospectivement sur mon intérêt si poussé pour les mathématiques (je l'ai développé beaucoup plus tard, me semblait-il). Plus loin, je comprenais qu'il s'agissait en fait de cours portant sur les énigmes des romans d'Agatha Christie. Elle était des mes premières ambitions.

"Les femmes, affirma Poirot, sont merveilleuses; elles inventent et, par miracle, elles ont raison."

jeudi 7 octobre 2010

The scarlet letter


("The scarlet letter", roman de Nathaniel Hawthorne écrit en 1850, raconte l'humiliation publique d'une femme adultère contrainte de coudre un A pourpre sur ses vêtements en témoignage de son péché.)

Je n'ai jamais été de nature prude sur ma vie privée, mais au cours des dernières années, je me suis contrainte à une certaine discrétion - toute relative - sur un aspect pourtant fondamental de mon existence: mon projet d'adoption, comme une que j'aurais tenue grossesse secrète. Je ne serais pas la première.

Au cours des dernières années, je suis devenue mère. Depuis le 28 mai 2010, lorsque j'ai appris que j'étais 33ième sur la liste d'attente du Honduras, un enfant grandit silencieusement dans mon coeur.

Les mois se sont égrénés, rognant lentement la liste d'attente. Maintenant que mon tour approche, je m'expose et j'affiche ma propre lettre écarlate. Mon A, comme dans Adoption.

J'aurais pu consacrer mon blog à cette aventure pour le moins roccambolesque, les émotions intenses et la matière narrative n'ont pas manquées. Pourtant, c'est intérieurement que j'ai choisi de vivre ces aléas.

Force m'a été de reconnaître que j'aurais atteint un public fort restreint dans mon entourage (non pas que mes tourments amoureux, ou mes passions artistiques ne soient d'un intérêt supérieur). J'aurais dû m'adresser à un auditoire nouveau - celui des mères célibataires - auquel je ne me sentais pas encore appartenir et auquel je ne voulais probablement pas me contraindre.

Alors voilà. Une nouvelle chronique est lancée, qui devrait durer les quelques mois qu'il reste à ce processus qui par moments m'a semblé interminable.

mardi 5 octobre 2010

L'empereur (4)


Quatrième carte du jeu: l'empereur. Il incarne la stabilité, c'est préférable pour l'empire - mais on en a connu des moins fiables. S'il y a eu César, il y a aussi eu Néron. Mais bon, la Rome antique pour les cartomanciens ce n'est peut-être pas trop pertinent. Il est un symbole de solidité et de durabilité. C'est Trojan qui me vient en tête - mais ça na rien à voir.

Alors là: protection d'un personne puissante et hautement placée. Le népotisme. Sujet dont je me régale volontiers car le terme rend hommage à un personnage que je ne peux pas blairer: le cardinal Borghese. Un voleur de première pour ceux qui n'auraient pas eu le chance d'en faire la connaissance! Il s'agit de visiter la Gallerie Borghese dans le parc du même nom au centre de Rome pour mesurer l'esprit tordu de ce vil individu qui s'est approprié par les moyens les plus sournois une collection d'art sublime. Et n'allez pas me dire que "la fin justifie les moyens". Dicton nieztchéen s'il en est. Bref, ceci n'expliquant en rien cela, il s'avère que ce cardinal était en fait le neveu du pape - un Borghese également - c'est de famille. Il avait donc le titre particulier de "cardinal-neveu (nipote - en italien)" qui le plaçait légèrement au-dessus de ses collègues. De ses abus de pouvoirs dûs à ses connexions familiales vient le terme "népotisme".

On ne sait jamais par quels détours une simple carte peut nous faire passer...

samedi 2 octobre 2010

La ferme aux animaux (livre # 2)

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"Vous n'allez tout de même pas croire, camarades, que nous, les cochons, agissons par égoïsme, que nous nous attribuons des privilèges. (...) Nous sommes, nous autres, des travailleurs intellectuels. La direction et l'organisation de cette ferme reposent entièrement sur nous. De jour et de nuit nous veillons à votre bien. Et c'est pour votre bien que nous buvons ce lait et mangeons ces pommes."

J'ai eu pendant des années une affiche d'une mise en scène au théâtre de cette oeuvre présentée à l'université Cambridge que j'avais arrachée sur un quelconque babillard lors de mon premier véritable voyage en solitaire. Elle n'avait pourtant rien d'extraordinaire - une photo en noir et blanc d'une tête de porc à l'air sadique.

J'étais dans mes années littéraires et j'avais tendance à collectionner les affiches des pièces du théâtre universitaire. Et Cambridge représentait pour moi un lieux de culte. Dans ma liste de regrets figure quelque part le fait de n'avoir jamais étudié dans une université anglosaxonne.

Comme le disait mon père: "il est difficile d'être père. On croule sous les reproches. Tu ne me pardonneras pas de ne pas avoir financé ton troisième doctorat et ton frère Xavier de l'avoir abandonné". C'est dire l'importance que les études ont pour moi de son avis.