jeudi 30 décembre 2010

L'heure des bilan


Très chers amis lecteurs,

En cette fin d'année, l'heure des bilans sonne. Nous en sommes à quelques 145 chroniques de publiées. Plus de 300 visites par mois d'un peu partout dans le monde, en grande majorité du Canada, mais aussi des États-Unis et de la France (plus de 100 pages lues dans chaque cas au cours des derniers mois), Malte, l'Inde, le Sénégal, le Vietnam et d'autres lieux exotiques.

Le message qui m'a attiré le plus grand lectorat, je ne m'en surprends pas, est la chronique intitulée "érotisme mystique". Dieu et le sexe dans un même titre, c'est vite incontournable sur les moteurs de recherche!!! Je ne suis pas certaine de ce que les internautes dans leur quête en ont pensé lorsqu'ils sont tombés sur Sainte-Thérèse... parce que les commentaires n'ont pas été aussi nombreux.

Les autres chroniques les plus lues sont "Dominik Sokolowski" à égalité avec "l'extase selon Victor Hugo" (un texte sur l'ennui!!), la mort d'Ivan Illich (livre #1) et la Saison estivale d'extase et tourment. (J'ai l'impression que le mot "extase" est également générateur de traffic sur mon site).

La prochaine année vous réserve le retour de certaines séries, comme la série estivale sur l'art, mais cette fois-ci seulement une fois par semaine, et un nouveau concept, le "no comment" qui viendra remplacer les chroniques du mardi sur le thème du tarot.

Une excellente année 2011 à tous mes lecteurs!!!

mardi 28 décembre 2010

La maison de Dieu (16)


Une tour de Babel qui s'effondre. Je me souviens petite, j'avais entendu une de mes tantes parler de son fils pourtant talentueux qui venait d'échouer un semestre au collège en disant qu'il venait de connaître son "Waterloo". J'ai probablement compris plus tard, dans un cours, d'histoire, de quoi il était question. Et plus tard encore, au hasard d'un voyage que ce fameux "Waterloo" se trouvait en Belgique (un moment de distraction dans le dit-cours d'histoire expliquerait sûrement la conviction que j'avais que cette bataille avait eu lieu en Angleterre).

Fascination que nous nourrissons tous pour les échecs grandioses : le Titanic, Napoléon, la tour de Babel...

Une tour pour atteindre le ciel. La prétention de l'Homme qui cherhce à s'approcher de Dieu. Au fond de chacun de nous se trouve cette aspiration à se dépasser, à se mesurer à plus grand que soi. Mais aussi, assez de mesquinerie pour ressentir une inavouable satisfaction devant l'échec d'autrui.

L'effondrement d'une autre tour, celles du World Trade Centre en 2001 n'avait-il pas provoquer dans certains coins du monde, son lot de manifestations de joie. Deux petits avions qui touchaient le géant en plein coeur. David contre Goliath.

samedi 25 décembre 2010

Le petit prince, St-Exupery (livre # 14)



Joyeux Noel à tous mes lecteurs!!! Quoi de mieux qu'un conte pour enfant pour souligner cette journée.

"Lorsque j'avais 6 ans j'ai vu, une fois, une image magnifique, dans un livre sur la forêt vierge qui s'appelait Histoires vécues."

Le premier roman de ma vie. J'avais 6 ans. J'étais hospitalisée pour une opération mineure. Je l'ai reçu en cadeau de ma voisine, Madame Saint-Pierre, une dame qui m'a toujours semblée agêe. Elle habitait au-dessus de chez nous avec ses quatre grands fils dans le quartier pas particulièrement riche de mon enfance. Elle avait fait ses beaux-arts, venait d'un milieu que j'imagine assez aisée puisque les femmes de sa génération ne faisaient pas d'études - si ce n'était pour devenir infirmière ou enseignante - et aussi d'une époque où une famille abandonnée par le père connaissait vite la ruine.

Son fils cadet - une jeune homme dans la vingtaine - était mort l'année précédente, dans un accident de moto qui n'en était probablement pas un. Un de ses frères était venu nous l'annoncer à l'heure du souper. Je comprenais qu'il s'agissait d'une mauvaise nouvelle, mais à ce jour, je me souviens surtout de la douceur, du calme qui régnait. Peut-être parce que mon frère et moi étions dans la salle.

Quelques mois après mon opération, ma mère a trouvé une maison dans un autre quartier. Tous les ans, elles ont continué à se téléphoner pour leurs anniversaires. ----

Le petit prince, c'est aussi une des pièces de théâtre du quartier dans lesquelles j'ai joué avec ma mère. Elle était costumière. Elle avait toujours les rôles de méchante et moi les rôles muets. Il me semble qu'elle faisait le serpent, et moi une rose parmi les roses. J'avais 7 ans.

"Je me croyais riche d'une fleur unique, et je ne possède qu'une rose ordinaire."

jeudi 23 décembre 2010

Les phases du deuil I - le Choc, le déni


Semaine du 12 au 19 décembre - Je pensais vous raconter les retrouvailles avec ma fille après une séparation de six semaines, sa course à travers la maison pour aller chercher un album quand sa famille d'accueil lui a demandé d'embrasser sa mère et le bec baveux qu'elle a donné à ma photo! Mais voilà, cette phase de transition que je souhaitais douce et longue me plonge au coeur du deuil. Je me suis préparée tant bien que mal à celui que vivra ma fille, mais c'est celui de la famille d'accueil que j'observe présentement.

Le choc, ou le déni, est "cette courte phase du deuil qui survient lorsqu'on apprend la perte. C'est une période plus ou moins intense où les émotions semblent pratiquement absentes. C'est en quittant ce court stade du deuil que la réalité de la perte s'installe."

Le choc s'explique probablement par ma décision de revenir au Honduras avant la date du jugement. La famille se s'attendait pas à me revoir si vite et comme légalement, je pourrais réclamer la garde permanente de la petite dès maintenant, cette situation n'est pas sans créer une certaine inquiétude. La perte se profile à l'horizon, mais sans échéance identifiable.

Chaque jour, je suis invitée à rester plus longtemps avec la famille d'accueil. Ils veulent m'enseigner l'espagnol et s'informent régulièrement de plans pour mon séjour. Tout en subtilité, ils me parlent de baptême catholique, du changement de nom de la petite, de l'apprentissage du français... De toutes leurs forces, ils essaient de me cacher leur résistance devant ces changements inévitables, mais quelque chose dans leur regard les trahit.

Pour l'instant, je surfe dans la situation, évitant les sensibilités tout en maintenant le cap sur mes décisions sans les imposer pour le moment.

Je ne peux qu'appréhender la prochaine phase - celle de la colère...

mardi 21 décembre 2010

Le diable (15)


Enfin! On s'éloigne diamétralement de la tempérance qui précédait le Diable et ses influences maléfiques... Carte de tous les excès! Certainement celle de l'extase et des tourments. Et pourtant, je me sens peu d'intérêt et d'affinité avec cette figure.

En plus, par les temps qui courent, il me semble que c'est une figure un peu désuète. Qui en effet se préoccupe du diable de nos jours? On ne le craint plus. On ne le prend même pas au sérieux. Bouc émissaire des biens pensants tout au plus, il est comme le dernier de classe un peu insignifiant qui joue avec ses petites autos pendant les cours et qui se prend toutes les remontrances de la maîtresse d'école. Un pauvre diable, comme on dit justement!

Ou encore, un bon diable, s'agiter comme un beau diable, tirer le diable par la queue, aller au diable, ça ne vaut pas diable, se donner un mal du diable... C'est dire le crédit qu'on lui accorde. De quoi avoir pitié!

Dans les pays scandinaves, contrairement à nos contrées catholiques, il est beaucoup plus tabou de parler du mal que du bien. Il est offensant de parler du diable justement. "Ajorte"

J'ai fait la connaissance d'un inuit au Groenland qui portait ce surnom (En faisant des recherches, je suis tombée sur un autre blog où il est question de lui http://berclo.net/page04/04fr-greenland-4.html). J'ai rencontré le Diable! Un ex-opioman qui s'est converti en travailleur social après l'overdose de sa compagne de longue date. Kristian de son vrai nom!! Dieu et Diable qui cohabitent dans une même personne....

samedi 18 décembre 2010

Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur, Harper Lee (livre # 13)


"Tous les ans, à Noël, il criait à travers la rue à Mme Atkinson de venir l'épouser. Et Mme Atkinson répondait: - criez plus fort, Jack, que l'on vous entende jusqu'à la poste. Quant à moi, je n'ai tourjours rien saisi."

"La seule chose qui ne doive pas céder à la loi de la majorité est précisément la conscience."

Ah! La traduction! J'en étais à douter de lire le bon livre jusqu'à ce que mes recherches me confirment que le livre que je tenais dans mes mains "Alouette, je te plumerai", n'était en fait qu'une traduction plus ancienne (bienque de la même traductrice) de "Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur". Qui existe également sous le titre de "Quand meurt le rossignol". L'original s'intitule en anglais "to kill a mockingbird".

Et ne parlons pas du cinéma qui l'a adapté dans les années 1960 comme Du silence et des ombres! Rien à voir!

Je ne lis peut-être pas beaucoup de romans étrangers, mais rarement il m'a été donné de voir une oeuvre porter trois titres différents...

Décidémment, ce livre aura été celui de toutes les confusions. J'ai dû consulter une bibliothécaire parce que je ne pouvais trouver en rayons ce roman de Lee Harper. Elle corrigea mon erreur en m'indiquant qu'Harper était son prénom et pas son nom de famille. (La confusion vient certainement du fait que cet exercise de lecture auquel je m'astreins est en relation avec un de mes voisins qui porte ce nom).

Sans compter que, armée de mes préjugés, je croyais que l'auteur était un homme. L'habitude j'imagine. Mais j'apprends qu'Harper est un prénom de femmes!! On m'en dira tant!

"Il se présente au moins une fois dans la vie de chaque avocat un cas qui le concerne personellement."

jeudi 16 décembre 2010

En attendant Stella ...


Novembre - Malgré le lot d'épreuves administratives, les semaines qui suivirent mon retour du Honduras furent certainement moins pénibles que la dernière année. Il y eut évidemment l'inspection de la maison (qui selon la travailleuse sociale vise en fait à confirmer de visu que la mère prétendante n'est pas enceinte!). Puis les remises en question du ministère qui, après avoir étudié pendant 3 mois mon dossier l'hiver dernier et l'avoir approuvé, s'inquiète maintenant d'une série de choses, notamment que je parvienne à effectuer la transition linguistique d'un enfant de deux ans alors que je ne connais que quelques mots d'espagnol. Je me retrouve une fois de plus au téléphone à justifier mes stratégies pour appuyer la petite avec son histoire, son adaptation...

Il y eut mes tentatives peu fructueuses de simplifier les procédures entourant le retour et qui prévoient que j'obtienne la citoyenneté de la section immigration de l'ambassade du Canada au Guatemala et le passeport canadien de la section consulaire de l'ambassade au Costa Rica... Nul besoin de préciser que je ne nourris nullement l'ambition de faire de ma fille une globe-trotter dès ses premières semaines avec moi. Elle aura largement le temps de goûter au style de vie nomade de sa mère.

Il y eut l'incontournable et tellement délicate question financière... Les paiements s'accélérant à rythme imprévu. Je retiens de tous mes séminaires sur l'adoption que l'argent est un sujet tabou, surtout lorsqu'il se rapporte à la parentalité. Je soupçonne pour ma part que ce malaise soit lié au fait que l'aspect monétaire rappelle douloureusement aux couples infertiles le deuil de l'enfant biologique. Les sommes astronomiques qui semblent être investies donnent aussi parfois l'impression qu'il s'agit de l'achat d'un enfant. Pourtant, c'est l'addition de toutes les démarches à 100$(certificats de police, médical, évaluation psychologique, formation pré-adoption), puis les coûts de l'avocate, de l'agence, de l'inspection, les billets d'avion, l'hôtel, les visa, les passeports, l'immigration... qui finissent par avoir raison du portefeuille.

Six semaines pour tout mettre en ordre et repartir l'esprit tranquille. Il semble que je me calme à mesure que le grand jour du départ approche... Je suis prête. Et vivement le premier jour du reste de ma vie!

mardi 14 décembre 2010

La tempérance (14)


"L'abstinence totale est plus facile que la parfaite modération" (Saint-Augustin)

A quoi répond Robert Benayoun "l'abstinence est une bonne chose pourvu qu'on la pratique avec modération"!

Pour un blog dédié à l'extase et aux tourments, quel revirement!

La modération, voilà ce que ma mère, dans sa sagesse, s'est acharnée à prêcher devant mes peines accablantes et mes joies explosives. Les émotions fortes effraient ceux qui ont le tempérament tempéré, je l'ai compris tôt.

Il m'a été profitable à plusieurs égard de naître d'une mère qui m'était si différente. Elle admirait chez moi des forces qu'elle n'avait pas. Elle avait des complexes qu'elle ne me transmit pas. Bref, il y a espoir, on n'hérite pas seulement des névroses de nos mères (voir chronique "de la paternité" en octobre).

La tempérance donc, comme la croix qui ornait le haut d'un mur de la cuisine chez ma grand-mère et ma tante Laurence. Ma mère m'avait expliqué qu'elle indiquait une maison où on ne consommait pas d'alcool. Un extrémisme, quant à moi, auquel ma famille, au sens le plus large, ne s'est jamais adonné. J'ai, de toutes les familles au monde, la plus modérée, tissée de gros bon sens, de discrétion et de mesure(c'est du côté maternel, on s'entend).

J'ai aussi et heureusement un héritage paternel pour équilibrer toute cette sagesse.

samedi 11 décembre 2010

Maus, Art Spiegleman (livre # 12)

"Maus raconte la vie de Vladek Spiegelman, rescapé juif des camps nazis, et de son fils, auteur de bandes dessinées, qui cherche un terrain de réconciliation avec son père."


Auschwitz - une visite qui ne peut laisser indifférente. Lors d'un court voyage d'affaires à Varsovie, il me fallait choisir pour ma seule journée libre entre Cracovie dont on disait beaucoup de bien et les camps de concentration. C'était en février. La désolation était complète. Le gris plus gris. Le froid plus froid.

Il ne reste plus que les baraques pour témoigner de l'Histoire. Et pourtant, l'endroit dégage toujours quelque chose de grave. Peut-être le fait de savoir donne-t-il au regard une autre dimension.
Certains camps ont été transformés en musées, avec des explications, des informations sur son fonctionnement, des détails historiques, des hommages aux victimes. D'autres au contraire sont demeurés intacts. Ils ne sont que déserts. Comme s'ils avaient été évacués la veille. On côtoie l'histoire avec 60 ans de retard.

Je me souviens d'un incident dans les années 90. Je voyageais en Angleterre où on célébrait le 50 ième anniversaire de la Libération. Je discutais dans une auberge de jeunesse avec une co-chambreuse allemande, et je lui avais demandé, sans penser plus qu'il ne faut à ma question, comment l'Allemagne célèbrait la fin de la guerre. Ce sur quoi elle me fit remarquer, bien à propos, qu'ils l'avaient pedue!

Ma question ne venait pas de mon ignorance puisque je n'étais pas sans savoir que l'Allemagne avait perdu la guerre, mais plutôt de cette impression solidement nourrie par l'approche historique manichéenne véhiculée dans les livres, le cinéma, l'école... La libération - c'était la victoire du bien contre le mal. Et les forces du mal avaient été anéanties avec Hitler. Donc personne n'avait de ce fait perdue la guerre!! Nous étions tous libérés...

Il est fascinant de constater comment un esprit, même minimalement éduqué, se laisse facilement pièger par des raisonnements fort tendencieux...

jeudi 9 décembre 2010

Quand Eugénie rencontre Stella...


Est venu ensuite le moment de la Rencontre... Dans un local des services sociaux rempli de sacs de vidange noirs pleins de vêtements et de jouets usagés qui font lieu de décor à mes premières photos d'elle. Nous sommes à l'étroit entre le bureau, où est assise une travailleuse sociale plongée dans ses documents et apparemment indifférente à la scène, et deux petites chaises en métal inconfortables. Je suis par terre. Elle sur les genoux de Martha.

Je suis une étrangère dans un lieu étranger. Armée de trois mots pour tout appât, je suis impuissante dans mon opération de charme. Pourtant, après un moment, elle fait un acte de foi incommensurable : d'un regard, elle me signifie qu'elle me donne une chance.

Les rencontres sont source d'inspiration. Dans le silence de la mer, un amour naît sans que jamais ne soit prononcée une parole entre les deux protagonistes appartenant à des camps ennemis. Dans Harold et Maude, deux univers diamétralement opposés entrent en contact...

La rencontre. Le moment fondateur d'une relation, celui qui donne le ton. En faisant des recherches sur la question, je suis surtout tombée sur des sites de "rencontre", des rencontres littéraires, sportives, au sommet... mais très peu sur la Rencontre décisive entre deux êtres humains qui unit leur destin de façon à ce que l'indifférence entre ces deux êtres soit désormais exclue.

"Une rencontre, c’est quelque chose de décisif, une porte, une fracture, un instant qui marque le temps et crée un avant et un après." (L'évangile selon Pilate)`

"A chaque rencontre, une nouvelle histoire s'écrit. C'est là que réside le plus étonnant mystère de l'aventure humaine." (La force de guérir Odile Jacob)

mardi 7 décembre 2010

La mort (13)


C'est la carte sans nom qui porte le numéro 13. Elle représente la mort, mais n'en porte pas le titre car on ne peut la nommer. Si elle revient souvent dans les films pour annoncer la fin tragique d'un personnage, sa signification divinatoire réelle n'est en rien aussi tragique.

Elle annonce un changement de vie déjà accompli et la renaissance - le début d'une relation, d'une carrière, d'une vie nouvelle. C'est en fait la mort de ce que l'on était avant - comme l'enterrement de la vie de garçon - un rite de passage.

Comme si l'homme de tout temps avait reconnu l'inconfort qui accompagne les transitions - le rite de passage marque le courage nécéssaire pour traverser cette inévitable transformation en même temps qu'il confirme l'appartenance à un nouveau groupe.

J'adorais dans ma petite enfance, l'histoire du vilain petit canard. Il me semble avoir repenser à ce conte tout au long de l'adolescence - qui est en soi une étape de transition avec ses difficultés. "Growing pain" disent fort à-propos les Anglos!

"Il n'y a aucune importance à être né parmi les canards si on a été couvé dans un oeuf de cygne! Il ne regrettait pas le temps des misères et des épreuves puisqu'elles devaient le conduire vers un tel bonheur!"

samedi 4 décembre 2010

Les Watson, Jane Austen (livre # 11)


Ah! Jane Austen. Je suis une fan et pourtant je n'en ai jamais lu. Dans mon cinéma de quartier, qui semble sortie d'une autre époque, j'ai eu ma saison Jane Austen.

Il y a eu "Emma" - une jeune femme d'une petite ville de l'Angleterre du XIXe siècle qui cherche un mari pour sa meilleure amie, mais qui a plus de succès pour elle-même que pour sa protégée.

Il y a eu "Orgueil et Préjugés" avec le fameux Mark Darcy (pour les amateurs de Bridget Jones parmi vous - vous apprécierez le clin d'oeil). Une jeune femme, toujours, libérale et de caractère indépendant, prise entre deux soupirants fort différents.

Il y a eu "Raison et Sentiments". Une famille bourgeoise mis à mal par le décès du père, est recueilli par un membre de la famille. Les nombreuses soeurs connaissent des aventures amoureuses avec les nobles et les moins nobles de la région.

Jane Austen, c'est le sentimentalisme sans vergogne. C'est du pur Harlequin pour la bourgeoisie britannique, avec tout le pathétique de l'opéra, mais une réserve anglaise et une fin heureuse. C'est le romantisme féminin poussé dans ses retranchements. Mais avec une pointe d'ironie.

Jane Austen est restée plutôt secrète de son vivant. Proche de sa famille, elle rencontre à 20 ans, dans un bal, le neveu d'un voisin. Mais le mariage est impossible pour des raisons de fortune. Elle meurt à 41 ans, célibataire... Ironie du sort!

jeudi 2 décembre 2010

Et un morceau de robot!


(25-26 octobre) Je vous ai épargné jusqu'à présent la première année de démarches administratives obligatoires pour qui choisi le chemin tortueux et non sans embûches de l'adoption. Avant la grande rencontre, il me fallait encore rencontrer pendant deux heures une psychologue, puis une travailleuse sociale. J'ai également dû me soumettre à une batterie de tests psychométriques, dont le Minessota Personnality Inventory Test, composé de 600 questions en anglais auxquelles il faut répondre par vrai ou faux. Pour vous en donner un aperçu, voici une cinquantaine de questions que j'ai pu retrouver sur internet. Il faut s'imaginer l'étourdissement au bout de 600 questions du genre...

1 - J’entends apparemment aussi bien que la plupart des gens
2 - J’ai peur de me trouver seul dans un grand endroit désert
3- Je me sens souvent très fatigué
4 - Ma mémoire semble bonne
5 - J’ai certainement eu plus que ma part d’ennuis
6 - Mes parents ont souvent critiqué mes fréquentations
7 - Je suis aussi capable de travailler que par le passé
8 - Il m’est arrivé de rencontrer des problèmes aux solutions si multiples que j’ai été incapable d’y réfléchir sérieusement
9 - Je me suis souvent senti coupable parce que j’avais prétendu que j’étais beaucoup plus chagriné par quelque chose que je ne l’étais en réalité
10 - J’éprouve parfois l’envie de me battre avec quelqu’un
11 - Il m’est arrivé souvent d’avoir des échecs parce que je ne pouvais me décider assez vite
12 - Mon comportement dépend, dans une marge mesure, des habitudes de mon entourage
13 - Je taquine parfois mes animaux
14 - Si on m’en donnait l’occasion, je serais certainement un bon meneur de foule
15 - Plusieurs fois par semaine, j’ai des brûlures d’estomac
16 - Autant que possible, j’évite de me trouver dans un foule
17 - Souvent, je remarque que mes mains tremblent quand j’essaie de faire quelque chose
18 - Je préfère un travail qui demande une grande attention à un travail qui me permette d’être négligent
19 - Je suis très violemment attiré par les personnes de mon sexe
20 - J’adorais l’agitation pendant mon enfance
21 - Je n’ai pas vécu une vie parfaitement droite
22 - Par instants, je suis possédé par des esprits
23 - L’avenir est trop incertain pour que l’on puisse faire des projets sérieux
24 - Je supporte aussi bien la douleur que les autres
25 - Je crois que j’aimerais beaucoup le travail de bibliothécaire
26 - Je rêvasse très peu
27 - Je n’appréhende pas de voir un docteur quand je suis malade ou accidenté
28 - Je n’ai jamais eu de paralysie faciale
29 - Je n’ai jamais eu d’éruption cutanée qui m’ait ennuyé
30 - J’ai des cauchemars presque toutes les nuits
31 - J’ai la conviction qu’on ne devrait pas boire des boissons alcoolisées
32 - Si plusieurs personnes se trouvent dans un mauvais cas, ce qu’elles ont de mieux à faire est de se mettre d’accord sur une histoire et de s’y tenir
33 - Une personne ne devrait pas être punie pour avoir violé une loi qu’elle juge déraisonnable
34 - Je refuse de participer à certains jeux parce que je n’y suis pas fort
35 - La plupart du temps, j’ai le sentiment d’avoir fait quelque chose de mal ou de travers
36 - Parfois, je suis si excité qu’il m’est difficile de m’endormir
37 - Je n’ai pas très peur des serpents
38 - Je recule devant les difficultés ou les crises
39 - J’aime ou j’ai aimé la pêche
40 - Il me semble fréquemment avoir comme un poids dans la tête ou dans le nez
41 - Je pense que je suis plus sensible et je crois que je ressens les choses plus profondément que les autres
42 - J’ai très peu de maux de tête
43 - Je ressens rarement des bourdonnements ou des tintements d’oreilles
44 - Mon sommeil est agité et troublé
45 - Je rêve très rarement
46 - Il y a eu des moments où j’ai eu une très grande envie de quitter ma maison
47 - J’ai eu des déceptions amoureuses
48 - Quand je me sens très heureux ou très actif, quelqu’un qui est démoralisé ou triste gâchera tout
49 - J’aime lire les éditoriaux des journaux
50 - La plupart de mes rêves ont trait à des questions sexuelles

mardi 30 novembre 2010

Le pendu (12)


Voir les choses sous un autre angle! Combien de quiproquo me serais-je évités si j'avais cette faculté d'envisager les situations de plusieurs points de vue?

Dans ma tendre jeunesse, alors que je faisais du pouce dans les campagnes irlandaises en compagnie d'une institutrice française avec qui j'enseignais dans un camp d'été, nous avions été prises à bord d'une camionette par un jeune homme somme toute charmant. Pendant les premières heures du trajet, nous avions tranquillement badiné. Nous faisions gentiment la conversation lorsqu'il mentionna qu'il était un passionné de moto. Je détestais au contraire la chose, lui racontant que j'avais eu la frousse de ma vie sur un tel engin.

Soudain pris d'un accès de timidité, se mordant les lèvres pour ne pas poser une question qui le brûlait, il finit par se lancer, non sans créer une certaine appréhension chez moi avec toute cette hésitation: "were you wet?". Ne comprenant pas très bien le sens de cette question, je me suis dit que "mouillée" dans ce cas devait faire référence à "sueur froide" ou quelque chose du genre. J'ai vite compris à son regard que j'avais mal interprété alors il répéta, se passant cette fois-ci une main entre les jambes pour illustrer son propos. Me demandait-il si l'expérience m'avait excitée?!?!

J'avais 19 ans. Je devins sur le champs écarlate de colère, mettant brutalement fin à une conversation qui avait été jusque là légère et sans malice. Comment pouvait-on se permettre une telle vulgarité? Et ma co-voyageuse française qui ne bronchait pas!

A la station-service où nous nous étions arrêtés pour faire le plein, je la prends à part. "Mais, tu as entendu ce qu'il a dit? Il est hors de question que je retourne une minute de plus avec ce pervers!". Ce sur quoi elle me répondit le plus calmement du monde "voyons Eugénie. Tu lui disais que tu avais eu peur en moto et il t'a demandé si tu avais fait pipi dans ta culotte." Puis elle ajouta avec un sourire discret: " J'avais bien deviné le malentendu. C'est vrai que le geste dans l'entre-jambe portait à confusion." Et de ce coup, c'est moi qui me trouvait confuse... L'esprit pervers était donc le mien!

samedi 27 novembre 2010

Mademoiselle Julie, Auguste Stindberg (livre # 10)


"Personne ne croira que vous vous abaissez volontairement. Les gens diront toujours que vous tombez"

Une des rares pièces de théâtre que j'ai vues à plusieurs reprises. Peut-être faisait-elle l'objet d'une mode dans le milieu artistique à cette époque.

La première représentation était à l'Espace Go dans une mise en scène de Brigitte Haentjens avec Anne-Marie Cadieux et Marc Béland en 1996. C'est mon amie Crick, une enthousiaste de théâtre qui m'y avait traînée. C'est un milieu que le karma me fait vivre par personne interposée, mettant sur mon chemin acteurs, dramaturges, metteurs en scène, marionettistes, accrobates...

La seconde nous amène à Londres deux ans plus tard. Séjour européen qui m'a permis d'approcher tout un univers artistique qui ne semble pas faire de détour par le Québec. J'y ai vu Juliette Binoche dans "Naked" et "Oh! Les beaux jours!" mis en scène par Peter Brooke. Fascinée de voir se matérialiser le monde
artistique que je n'avais alors aborder que par l'intermédiaire de mes livres ou d'un écran de télé.

En même temps, ce fameux séjour londonnien fut l'occasion de démystifier saint-martin in the fields et covent garden! "C'est ça?!?", me dis-je un peu déçue. Comme quoi les attentes ont le pouvoir de miner ou de magnifier une expérience. C'est selon.

P.S. La traduction que j'ai lue était de Boris Vian. Je l'ignorais traducteur, mais en soit, c'était comme un clin d'oeil à cette autre époque de ma vie...

" Ah! On peut s'enfuir, on peut s'enfuir, mais les souvenirs vous suivent dans le fourgon, et les regrets, et les remords..."

jeudi 25 novembre 2010

Vers l'inaccessible étoile


24 octobre (à l'aube) - C'est un départ tant attendu. Je ne connais rien de cette région du monde où je pars à l'aveture. Je n'en connais pas la langue. Mais à chaque moment qui passe, j'ai le sentiment toujours plus fort de m'approcher du but, d'avoir pris la bonne décision. Dans l'aéroport où je suis en transit, je regarde les passagers qui attendent le même vol que moi et je me prends d'une sympathie naturelle pour eux. Je cherche dans leurs visages les traits de ma fille. Elle sera belle. Et j'ai aussi l'impression d'être des leurs. Je leur ressemble.

C'est un beau pays que je découvre. Le soleil d'éte me réchauffe et me donne l'illusion d'une vacance que je n'ai pas eu l'occasion de prendre cette année alors qu'à la maison l'hiver s'installe lentement. Je profite d'une journée de rencontres annulées pour cause de congé férié déplacé (la fête nationale du 21 octobre ayant été remise au 25 à la dernière minute) pour une escapade dans les villages des environs.

Contrairement à mes voyages récents, mon statut de touriste nantie ne me vaut pas d'attention spéciale. Je marche librement. Les vendeurs dans les boutiques me font des rabais que je n'ai même pas négociés. Jusqu'à 25% de réduction sur les prix (après avoir décidé d'acheter, pas avant!!!). C'est vous dire à quel point je dois me faire avoir. Ils n'ont pas le coeur de m'escroquer à ce point.

Mon chauffeur de taxi, Norman, que j'ai également adopté, me donne en prime un tour du centre-ville après notre tournée des villages. En cette journée de congé férié, le pays m'appartient. Il se fait docile pour sa première impression. Et c'est réussi.

mardi 23 novembre 2010

La force (11)


Chaque carte a une interprétation dominante, mais c'est la limite entre les deux pôles de cette interprétation, positive et le négative, qui m'intéresse le plus. La ligne de faille autant que la clé de voûte. Si la force parle de détermination et d'esprit volontaire, elle réfère également à la discipline et au contrôle de soi. Et c'est là que les choses deviennent dignes d'intérêt. Lorsque le barrage qui retient courageusement le torrent depuis des années s'apprête à céder.

Le contrôle de soi. Il me semble que ce soit un concept surtout masculin, mais je pourrais bien me tromper. Ce sont des conversations récentes qui me donnent peut-être cette impression. Un collègue notamment, qui s'il se voyait avec mes yeux se rendrait bien compte qu'il se noie, mais qui prétend avoir toujours la situation bien en main. Qui se sabote comme j'ai rarement vu, mais qui croit encore qu'il peut tout arranger à force de volonté. Qui a miné sa vie avec plus de soin et de zèle qu'un moudhjahidine tchéthène, mais qui se convainc toujours que ce n'était qu'un moment de folie.

Alors je reste sur la berge. Je le regarde jouer les Hercules tentant d'endiguer le cours d'un fleuve qui de toute évidence veut aller ailleurs. Une guerre d'usure dont je n'ignore pas le vainqueur.

Ce qui me plaît du contrôle de soi, c'est qu'il annonce la mutinerie justement. Du combat intérieur qui se jouera inévitablement, je demeure une spectatrice attentive et passionnée.

samedi 20 novembre 2010

Chronique d'une mort annoncée, Gabriel Garcia Marquez (livre # 9)


"Il faut toujours être du côté du mort"

Gabriel Garcia Marques me rappelle surtout mon échec répété à lire Cent ans de solitude. Le titre m'attire depuis toujours. Il me semble que je pourrais épancher toute ma mélancolie naturelle dans un tel roman. Et pourtant, immancablement, au bout de quelques chapitres, je m'essoufle chaque fois. Et repose le livre jusqu'à l'essai suivant.

"Il aurait pu répondre n'importe quoi d'autre tant sa façon de s'exprimer lui servait beaucoup plus à dissimuler qu'à se confier."

Comme une montagne infranchissable. Cent ans de solitude est un effort constant. Le plaisir de la lecture n'est jamais venu à ma rencontre comme c'est généralement le cas. Au bout d'une cinqantaine de pages, l'histoire m'absorbe et je plonge dans le roman. Jamais dans celui-là.

"Il se portait mieux que nous tous, mais quand on l'auscultait on entendait les larmes bouillonner dans son coeur."

L'autre oeuvre qui me fait cet effet est Le sacre du printemps de Stravinsky. Je n'ai jamais pu l'écouter plus de quelques minutes. Je suis sourde à cette musique.

"Elle nous en apprit peut-être beaucoup plus long que le nécéssaire, mais avant tout qu'aucun endroit sur cette terre n'était plus triste qu'un lit vide."

Cette mort annoncée par contre, se parcourt tout d'un trait.

"Manger sans mesure fût toujours sa seule façon de pleurer."

Un ami dont je ne parle jamais dans ce blog considère La mort au temps du choléra comme son livre phare. Ce penchant annonçait un romantisme auquel je n'eus pas droit.

"Les autres protagonistes de la tragédie avaient joué avec dignité et même une certaine grandeur le rôle privilégié que la vie leur avait réservé."

Toute cette oeuvre est courronnée du prix Nobel de littérature - ce qui m'amène une fois de plus à mesure l'ampleur de mon ignorance. Je parcours la liste des récipiendaires pour me rendre compte que j'en connais très peu et que j'en ai lu encore moins.

"La haine et l'amour sont deux passions réciproques".

A la façon Garcia Marques : Theodor Mommsen, Rabîndranâth Tagore, Grazia Deledda, Jonh Galsworthy, Gabriela Mistral, Salvatore Qasimodo, Ivo Andric, Patrick White, Czeslaw Milosz, Kenzaburo Oe, Imre Kertész. Vous connaissez?

"Donnez-moi un préjugé, j'ébranlerai le monde".

jeudi 18 novembre 2010

Mère poule, mère l'Oie



17 octobre - "nesting is the term used to refer to an expectant mother's instinct which gives her a surge of energy which prompts her to clean and do various chores around her home. Nesting usually arises as the mother nears her due date."

La première question que la majorité des gens à qui j'ai annoncé l'adoption de ma fille a été : "et la chambre du bébé??" Question à laquelle je répondais habituellement par une grimace toute aussi inquisitrice et anxieuse. Il me fallait isoler le toit, faire réparer la fournaise, arracher les clous de l'escalier que j'avais entrepris de décaper avant d'apprendre la nouvelle, compléter les démarches d'immigration, refaire mon passeport perdu au cours de mon récent déménagement, préparer mon entrevue pour le concours de promotion, obtenir une évaluation médicale, préparer mon premier voyage au Honduras... Alors le choix des draps et les couleurs des rideaux!?!? Loin de me préoccuper...

Et voilà que dans un moment de pur délir maternel, en une seule fin de semaine, j'ai non seulement fait la chambre, mais nettoyé au complet la maison laissée depuis quelques temps à l'état de chantier post-rénovations.

J'ai loué une voiture pour me rendre dans la banlieue commerciale de la ville - un large boulevard où il faut se véhiculer de magasin en magasin. Ma furie consommatrice m'a permis en quelques heures de tout trouver pour métamorphoser une pièce de plus de ma maison. (Ainsi que le siège d'auto et les cadeaux que j'amènerai en voyage).

Le dimanche, j'ai peinturé la chambre - un jaune très pâle. J'ai cousu les coussins qui vont sur le banc en bois, installé les rideaux, appliqué les images auto-collantes, fixé les cadres-photo... Le tout sous la thématique du cirque. Les animaux sauvages (mais gentils, mignons et dociles) ont envahis les murs, le couvre-lit, les rideaux...

mardi 16 novembre 2010

La roue de la fortune (10)


"Parce que seul l'instant présent m'appartient", disent les yogis. La roue de la fortune parle du mouvement perpétuel et des cycles de la vie. Le cycle qui caractérise le mieux la mienne est celui qui m'amène de la sédentarité à la nomadité. Christophe me l'avait décrit pour la première fois lorsque nous nous sommes connus, il y a bien une dizaine d'années. Il s'apprêtait à affronter l'océan en voilier. Cette mésaventure aura nourri des racines chez lui puisque je l'ai retrouvé une petite décennie plus tard solidement ancré à Montréal.

Christophe m'avait parlé de ce sentiment de lourdeur qui s'installe insidieusement. Un jour, on se réveille et le mobilier nous semble pesant, le garde-robe plein de vêtements inutiles, les bibelots, les souvenirs de voyage superflus... Ce jour-là, le poids de nos biens matériels nous étouffe et on commence à donner, jeter, recycler. On voudrait qu'une valise puisse contenir l'ensemble de ses avoirs et on se surprend à rêver d'ailleurs.

Puis on part à l'aventure. On se sent léger. C'est l'insoutenable légerté de l'être. L'inconnu prend des airs de liberté.

Jusqu'à ce que l'appel du pays se fasse de nouveau sentir. Le goût de s'installer, de s'enraciner prend le dessus. On se croit guéri...

Je suis une enfant de la course destination monde et comme plusieurs d'entre vous peut-être, les mots d'Hugo Latulippe dans son dernier film me sont restés:

La Terre plantée dans le coeur
Partir, partir parce qu’on poursuit tous des idées mythiques.
Partir par pur souci esthétique. Partir parce que c’est important de savoir.
Partir parce que c’est rock n roll. Partir sur les traces de nos rêves. Partir, mais partir pour revenir... Revenir, revenir plein de soleil et d’espoir d’ailleurs parce qu’on a compris que d’un point de vue logistique, on s’auto-suffit, mais qu’émotivement, pas du tout.
Revenir parce que ça fait du bien. Revenir parce qu’on en a assez de s’immiscer dans la vie des autres et qu’on veut entendre l’avis des nôtres.
Revenir et ne jamais oublier la guerre, la misère, la haine, les blessures.
Revenir pour ne plus jamais s’incliner devant autre chose qu’une montagne, un arbre, une rivière, un sourire.
Revenir et prendre le parti des enfants, des baleines, des aurores boréales et des odeurs de printemps.
Revenir après 40 décollages, 97 contrôles douaniers, 567 repas,62 interviews, 6 ou 7 sanglots, 3165 éclats de rire, une vingtaine de p’tits films et une conviction.
Si les p’tits culs de Karashi peuvent sourire à manger de la marde.
Si les petits soudanais peuvent danser l’estomac plein de sable.
Si un palestinien peut oublier le meurtre de sa mère au nom de la paix, j’vois pas pourquoi moi, j’aurais pas confiance jusqu’à la fin du monde.
J’vois pas pourquoi moi, j’sourirais pas jusqu’à la fin des temps.
Revenir, persuadé que la seule chose au monde qui compte vraiment, c’est d’avoir un coeur pour revenir.
Revenir, de l’humanité plein la tête.
Revenir, la Terre plantée dans le coeur. Revenir, mais revenir pour repartir.
Ce soir, c’est fini et ma tête tourne, mais la Terre tourne. Salut!

samedi 13 novembre 2010

Short and Sweet: 101 very short poems (livre # 8)


"Dans le désert
J’ai vu un être, nu, bestial,
Qui, accroupi sur le sol
Tenait son coeur dans ses mains,
Et en mangeait.
Je lui demandai,
Est-ce bon, mon ami?
’C’est amer – amer,’ répondit-il:
Mais j’aime ça
Parce que c’est amer,
Et parce que c’est mon coeur.' "

Cette chronique devrait aussi être l'occasion de parler des lieux que me font découvrir ces lectures - parce qu'elles ne me plongent pas toutes dans mon passé ni ne réfèrent à des événements de mon existence. Sans compter que je ne possède pas plusieurs de ces livres et j'ai fait le choix délibéré et ferme de ne pas nourrir mon vice ancien pour l'achat de bouquins qui viennent peupler mon petit espace. Surtout, comme l'explique Daniel Pennac dans "comme un roman", il est extrêmement difficile de se défaire de la possession des livres. Ils suscitent chez leurs propriétaires un sentiment d'attachement irrationnel.

A ma connaissance, les seuls livres que j'aie donnés à une oeuvre de charité étaient une série de manuels sur "l'art de rencontrer un mari" que m'avaient offerts des amis qui me veulent du bien. J'ai pensé que je pourrais partager cette belle sagesse populaire avec les pauvres de ma région. Un peu d'amour, ça ne peut que réchauffer en hiver!

Enfin, faute de pouvoir mettre la main sur une copie de ce recueil de poèmes, j'ai dû me contraindre à le consulter dans une librairie "commerciale" du centre-ville où les nombreuses allées de la section anglophone m'offrent un refuge pour lire en tranquilité sans acheter.

(Est-ce éthiquement un vol? Eh bien! Je me déculpabilise en choisissant d'investir ma fortune dans la cause de l'édition francophone!)

Je mesure toujours mon exil lors mes visites incontournables aux librairies francophones du monde entier. (Pour une raison que j'ignore, le désir d'offrir un livre à un ami me prend toujours lorsque je suis en voyage et je me surprends chaque fois de la sélection limitée qui s'offre à moi). Même dans cette ville pourtant aussi francophone et éduquée, trois maigres rayons qui exposent livres de cuisine, guides parentaux, dictionnaires, les "bouillons pour l'âme" et quelques très bons vendeurs qui ne prendront pas la poussière sur les étagères.

Voici un univers dans lequel l'improvisation m'est refusée. Le désir soudain de lire un roman russe m'avait pris un soir de semaine - et ma sortie nocturne pour l'assouvir fut vaine. De quoi refouler le lecteur intérieur qui sommeille en chacun de nous.

"Certains hommes n’y pensent jamais.
Toi non. Tu arrivais
Et disais que tu m’avais presque apporté des fleurs
Mais il y avait eu un malheur.
Le magasin était fermé, ou tu avais eu des doutes -
Du type que des esprits comme les nôtres
Inventent instantanément.
Tu pensais
Que je ne voudrais peut-être pas tes fleurs.
J’en souriais et je te serrais fort dans mes bras.
Maintenant, je peux tout juste sourire.
Mais vois, les fleurs que tu m’as presque apportées
Ont duré tout ce temps. "

jeudi 11 novembre 2010

Les rêves sont toujours des départs


5 octobre - Enfin!!!! Je viens de recevoir mes dates de départ pour mon premier voyage, non sans quelques retournements de situation. Je pars dans un mois. Le ministère de l'enfance devait d'abord me rencontrer les 21 et 22 octobre. Or il s'avère que le 21 est férié. On a remis le tout à la semaine suivante (les 25 et 26). Jusqu'à ce qu'on m'annonce quelques jours plus tard que le congé du 21 était remis au 25!! Et que mes rencontres auraient donc lieu les 26 et 27. Maintenant que mes billets d'avion sont achetés, prions pour que les dates demeurent à l'intérieur de mon voyage prévu.

Je dois d'abord subir une évaluation psychologique (la quatrième en tout dans ce processus) avec une travailleuse sociale qui décidera au terme de la rencontre si je peux passer à l'étape suivante. Puis le lendemain, une psychologue/psychiatre fera de même. Le troisième jour, je devrai présenter des documents à la cour. Il est prévu qu'une rencontre avec l'enfant soit organisée ensuite (conditionnellement à la réussite des étapes préliminaires).

Certains de mes amis ont une image très romantique de cette rencontre mère-fille. Je suis plus modérée. Il y aura, outre les deux principales intéressées, un psychologue du ministère, mon avocate, le traducteur, la famille d'accueil.... Intime comme tête-à-tête!!!

D'autres bonnes nouvelles ont suivi. Le dossier d'immigration a été accepté du jour au lendemain! Mon rendez-vous pour l'inspection finale de la maison est fixé...

À chaque épisode, Sophie G., dépassée par les retournements administratifs, continue à soutenir qu'il est plus facile d'accoucher.... le débat est ouvert!

mardi 9 novembre 2010

L'hermite (9)


Voilà une carte qui me rejoint en ce moment : celle du mouvement lent et de l'attente. Certains lecteurs connaissent mes projets de vie et saisissent dans quelle mesure cette douce progression des choses se traduit dans ma vie. C'est aussi d'ailleurs la carte de la discrétion, de la prudence et de la patience.

L'hermite parle de la recherche méthodique de la vérité. C'est un projet trop amibitieux pour moi. Je ne saurais d'ailleurs pas très bien définir la vérité. Tellement de nuances et de contre-exemples m'ont forcé à accepter qu'au mieux, les années me permettront de me comprendre davantage, mais que même ces vérités que j'aurai récoltées au gré du temps ne seront probablement vraies que pour moi. Par contre, quelle sensation merveilleusement libératrice chaque fois que la lumière se fait dans un coin de notre âme resté jusque là dans l'obscurité.

L'hermite réfère également à la fatigue, aux phases difficiles, aux zones d'ombre. Combien de fois ai-je été témoin de la traversée du désert de mes amis - crises conjugales, séparation, fausse couche, infertilité, réorientation professionnelle et sexuelle, épuisement et dépression? Si je me réjouis de leur bonheur, rien ne m'inspire plus de respect que de les voir accepter lucidement d'aller vers l'intérieur pour y chercher des réponses - qu'ils connaissaient souvent avant même de plonger et qu'ils craignaient tout aussi certainement parce qu'une fois le constat mis à jour le dur effort de la transition ne peut plus être évité et il faut prendre le risque de s'engager dans une nouvelle voie.

samedi 6 novembre 2010

Candidte, Voltaire (livre # 7)


"Hélas, dit Candide, je l'ai connu, cet amour, ce souverain des coeurs, cette âme de notre âme; il ne m'a jamais valu qu'un baiser et vingt coups de pied au cul. Comment cette belle cause a-t-elle pu produire en vous un effet aussi abobinable?"

Candide appartient à la période la plus stimulante de ma vie. Ce fut à certains égards une période trouble et sombre, mais aussi un moment charnière significatif qui m'a lancée dans l'âge adulte. Une aventure à la fois effrayante et prometteuse.

L'oeuvre était au programme de mes études collégiales. J'avais découvert certains romans à l'école secondaire, mais c'est ensuite que j'ai choisi de poursuivre des études littéraires au détriment du droit comme je le prévoyais depuis toujours. Est-ce une décision que je regrette avec le recul? Il m'est arrivé, très rarement, d'envier mes collègues ayant un bagage académique légal. Je lis très peu et il me semble souvent avoir complètement tourné le dos à la période littéraire de ma vie, pourtant, ce qu'il m'en reste continue à me nourrir. Je ne crois pas que je choisirais autrement si j'avais le luxe de refaire ma vie.

Je m'interroge souvent sur les regrets. Ils seront le fruit de quelles décisions prises aujourd'hui? J'ai longtemps pensé que les regrets étaient une illusion. Nous aspirons tous au bonheur. Nous prenons donc les décisions que nous croyons les meilleures pour y parvenir. Ainsi, les regrets seraient le résultat d'une déformation due à la perspective...

"Ma belle demoiselle, quand on est amoureux, jaloux et fouetté par l'Inquisition, on ne se connaît plus."

"Il parlait aux hommes avec le dédain le plus noble, portant le nez si haut, élevant si impitoyablement la voix, prenant un ton si imposant, affectant une démarche si altière, que tous ceux qui le saluaient étaient tenter de le battre."

jeudi 4 novembre 2010

Droit devant soi on ne peut pas aller loin


21 septembre - C'est une phrase du Petit Prince que je viens de lire. Elle reflète bien ma vie en général, faite surtout de détours. Mais aussi le cheminement sinueux de ce projet d'adoption qui fait des bonds magistraux avant de connaître des reculs, ou des moments de stagnation désespérants.

Depuis quelques mois, les étapes se franchissent à une vitesse inespérée. Mais depuis que la photo de ma fille est apparue sur mon écran il y a quelques semaines, le silence. Une date de départ aurait due m'être donnée dans les heures suivant mon acceptation. Les heures passent dans l'indifférence.

A chaque jour que je raye de mon calendrier, c'est un jour de plus sans elle.

A cela s'ajoute une saga en matière d'immigration - il me faudra attendre de 6 à 9 mois pour compléter sa demande de citoyenneté. Comme le ministère est sourd à mes demandes d'accélération du processus, j'ai dû m'en remettre à des politiciens. On m'a conseillé de conclure une entente avec l'orphelinat pour q'ils la gardent le temps que mes démarches aboutissent!!!

Mon calme m'étonne. J'explique avec le sourire qu'une telle option serait, à mon échelle toute personnelle, une catastrophe humanitaire et que biensûr, s'il le faut, je trouverai une autre solution.

Je suis David contre Goliath. Heureusement, c'est David qui gagne!

Une fois de plus, suspens. Les papiers d'immigration, l'inspection de la travailleuse sociale (qui dépend de la traduction des documents que je n'ai pas non plus), l'approbation provinciale (que je ne peux pas avoir sans le papier de citoyenneté et celui de la travailleuse sociale)...

Un soir cette semaine, en soupant, je n'ai pu m'empêcher d'avoir un pincement au coeur en me rendant compte qu'à force d'attendre, j'allais manquer son anniversaire. Un tout petit drame très personnel.

mardi 2 novembre 2010

La justice (8)


La Justice, avec une majuscule. Qui est-elle? Si Salomon était un homme, il semble pourtant que ce soit toujours cette femme aveugle, une balance et une épée à la main qui l'incarne. Une figure allégorique de la mythologie romaine. Plus tard, elle sera représentée enceinte pour montrer son expérience de la vie.

La justice au sens légal est contraignante. Elle s'articule autour des règles sociales. Comme le disait mon ex-procureur de frère, la chose fascinante dans la poursuite c'est de déterminer dans quelle mesure la société peut limiter l'exercice de la liberté d'un individu. Cette question se réinvente toujours. Je suis née dans une société qui condamnait l'avortement et acceptait sans contrainte la cigarette et l'alcool au volant. Je me souviens de mon étonnement lorsque j'ai appris lors d'un de mes voyages du début de la vingtaine que l'Irlande interdisait le divorce! Je n'aurais jamais même pensé que la chose soit possible. Comme quoi nous sommes un fruit de notre société et la justice n'en est que l'expression.

La justice au sens moral remet ultimement l'individu face à lui- même. Très protestant comme concept. On dit que les catholiques sont des bons vivants car ils bénéficient de l'absolution du prêtre. Leurs péchés se négocient contre des punitions. Le protestant est pris avec le poids de sa conscience. Il répond directement de ses actes à Dieu. Et comme le disaient les religieuses qui m'enseignaient "les voies du seigneur sont impénétrables"! Pas facile d'avoir la conscience tranquille!

samedi 30 octobre 2010

Bonjour tristesse, Françoise Sagan (livre # 6)


"Sur ce sentiment inconnu dont l'ennui, la douceur m'obsèdent, j'hésite à appose le nom, le beau nom grave de tristesse. C'est un sentiment si complet, si égoïste que j'en ai presque honte alors que la tristesse m'a toujours paru honorable. Aujourd'hui quelque chose se replie sur moir comme une soie, énervante et douce, et me sépare des autres."

Françoise Sagan. J'ai souvent l'impression que les vies intenses s'éteignent tôt. Je me trompe. Elle est morte à 69 ans après deux mariages et autant de divorces, un enfant, un avortement illégal qui lui fait signer le manifeste des 343 salopes, un premier roman à 18 ans, une vingtaine d'autres qui suivent, de nombreux amants et maîtresses, beaucoup de drogues et d'alcool, des cures de désintoxication, une fascination pour les voitures et la vitesse, un accident grave, un coma, quelques arrestations, un penchant pour le jeu, une condamnation pour fraude fiscale, une fin dans la misère.

Ainsi va son épitaphe composé de son crû :« Sagan, Françoise. Fit son apparition en 1954, avec un mince roman, Bonjour tristesse, qui fut un scandale mondial. Sa disparition, après une vie et une œuvre également agréables et bâclées, ne fut un scandale que pour elle-même. »

L'éternelle adolescence. Elle ne manque pas de me troubler lorsque je la rencontre dans mon entourage. La recherche de sensations fortes m'étourdit. Et je m'éloigne naturellement, non sans demeurée perplexe. Cette quête d'absolu ne me laisse pas indifférente, bien au contraire. Elle m'attire et je m'y brûle chaque fois.

" Leur résignation à ne pas plaire me semblait une infirmité indécente".

jeudi 28 octobre 2010

It's a...!

3 septembre - peu après-midi. Je reviens d'une réunion dans les bureaux du ministre. Un courriel tout simple m'attend avec un nombre impressionnant de pièces jointes. C'est le moment de vérité! Accoucher au bureau, en silence, dans le brouhaha des agendas à remettre aux sous-ministres, des appels à retourner, des mémos à obtenir d'urgence... Le temps s'arrête, alors que la vie autour continue.

Ma patronne entre en coup de vent pour me donner des instructions sur mes tâches à accomplir dans les heures suivantes. Je fais un effort surhumain pour enregistrer ces informations, comme si elles me parvenaient à travers un épais brouillard. Un autre courriel arrive en même temps dans ma boîte de réception personelle. Un courriel pour l'autre Eugénie, celle qui avait la vie d'avant l'accouchement. Un courriel un peu maladroit. Un petit pincement au coeur, que je ressens malgré l'engourdissement qui m'envahit lentement. Il me faudra trouver une réponse, mais pour l'instant les mots qu'il me faudrait trouver sont d'une langue étrangère.

Décrire ce plongeon est impossible. C'est un plongeon presque immobile - tout en douceur. J'apprivoise la photo de mon enfant à venir sur mon écran, mais cet enfant ne bouge pas, ne rit pas, ne joue pas. Je mesure toute la distance qu'il me reste à parcourir pour l'atteindre.

La rencontre de deux destins n'est pas le choc que j'aurais pu croire. J'ai le reste de ma vie devant mes yeux. C'est d'une très grande simplicité. Dans un instant, je suis devenue sa mère. Elle est devenue ma fille.

mardi 26 octobre 2010

Le Chariot (7)


La carte du triomphe et de la certitude. Voilà qui me ramène à Milan, dans un café des Navigli où j'avais une conversation avec une jeune collègue pleine de certitudes justement. Elle avait rencontré son conjoint à l'école secondaire. Ils avaient fait un mariage somptueux. Ils avaient tous deux réussi le concours et allaient partir en poste ensemble. Dans leur courte vie, tout leur avait souri. La réussite et les succès étaient pour elle une évidence. Et c'est lorsqu'elle s'est exclamée "quand c'est le bon, on le sait tout de suite", que j'ai compris que la vie m'avait enseigné une grande leçon. Quelques années auparavent, j'avais eu la certitude moi aussi d'avoir "rencontré le bon" et je m'étais alors là royalement fourvoyée. Une erreur qui m'a très longtemps ébranlée. Et j'ai compris à cet instant que n'eut-je pas vécu cet échec, j'aurais certainement cette arrogance prétentieuse de ceux qui sont armés de leur certitude. Que le doute qui m'habite depuis, s'il me rend plus fragile et vulnérable, me permet également de saisir des nuances qui m'échappaient jusque là; me force à l'humilité, mais m'offre en échange une humanité beaucoup plus riche.

Devant le triomphe et la gloire, je fais l'éloge de l'incertitude! Dans le testament, le passage qui me touche le plus est d'ailleurs celui pendant lequel Jésus, sur le Mont Golgota, prie alors que ses disciples sont endormis et demande "Père, pourquoi m'avez-vous abandonné?". Nul besoin d'être religieux pour reconnaître ce sentiment universel d'abandon et d'isolement devant un deuil, un échec, une difficulté.

samedi 23 octobre 2010

Le Bhagavad Gita (livre # 5)


Voilà des semaines que je procrastine à l'idée de m'attaquer à ce livre... Ce qui me rappelle "Les droits imprescriptibles du lecteur" tirés de Comme un roman de Daniel Pennac.

J'avais 16 ans. J'étais en formation d'anglais à l'université de Sherbrooke et je traversais un été particulièrement difficile de ma vie. En marchant dans un corridor, j'avais apperçu l'affiche publicitaire de ce livre dans la vitrine de la librairie. J'étais entrée demander si je pouvais l'avoir et sans même une hésitation, le libraire me l'avait remise.

L'affiche est restée sur le mur de ma chambre une quinzaine d'années. Jusqu'à ce que je libère ma mère des traces les plus évidentes de ma présence passée dans ces lieux.

J'ai maintenant l'impression d'être concurrente à l'émission "Qui veut être millionnaire?" et de me prémunir d'un de mes atouts. Je commence par le premier : le droit de ne pas lire un livre.

Voici donc les droits imprescriptibles du lecteur, aussi sacrés que les 10 commandements:

1. Le droit de ne pas lire.

2.Le droit de sauter des pages.

3. Le droit de ne pas finir un livre.

4. Le droit de relire.

5. Le droit de lire n'importe quoi.

6. Le droit au bovarysme (maladie textuellement transmissible).

7. Le droit de lire n'importe où.

8. Le droit de grappiller.

9. Le droit de lire à haute voix.

10. Le droit de nous taire.

jeudi 21 octobre 2010

L'attente


27 août - Un mois après l'appel innattendu qui m'annonçait un retournement de situation dans le processus. J'ai un enfant - dans le sens générique du terme.

D'abord un courriel dans lequel l'agence indiquait quelle souhaitait me rejoindre sans préciser la raison, sinon que c'était très important. Ensuite, pendant de longues heures, rien. Est-ce que j'avais un enfant? Un garçon, une fille? Quel âge? Où? Que le silence pour répondre à ces questions qui me hantaient de plus en plus. Au seuil de la folie, j'ai finalement réussi à contacter quelqu'un qui a pu me confirmer qu'on m'avait assigné un enfant, mais que les détails devaient suivre.

J'ai alerté deux pédiatres qui s'étaient engagés à analyser les résultats médicaux, un ami capable de traduire le dossier, la travailleuse sociale responsable d'approuver l'adoption, les services d'immigration pour qu'ils accélèrent des procédures trop lentes... Nous sommes une armée au garde à vous. Mais le général ne vient pas.

Quatre jours plus tard, on me confirme que quelque part, dans les documents du ministère de la Famille, je suis la mère d'un enfant qui existe, qui vit, qui a un nom, un visage, un jouet préféré. Mais qu'il manque un document légal pour permettre à mon intermédiaire d'obtenir ces documents. Une procédure qui pourrait prendre trois semaines.

Pendant ce temps, je serai la mère d'un enfant qui grandit, qui fait des dents, qui dort la nuit, ou non, qui joue avec son jouet préféré, mais dont je ne sais rien.

J'attends.

L'attente, c'est la promesse d'un bonheur si fragile qu'elle craint les mots.

J'ai perdu le goût des rencontres. Je ne trouve plus de refuge que dans le silence intérieur, la musique et le sommeil. L'attente est un exercice solitaire.

J'attends.

Et je savoure plus que jamais le choeur à bouche fermée dans l'opéra Madame Butterfly : en attendant le retour de son amant sur le navire qu'elle voit arriver au large, Madame Butterfly chante un air sans parole. Je vous invite d'ailleurs à l'écouter : http://www.youtube.com/watch?v=Ewu0M5tkvHA&feature=related

L'essence de l'attente si trouve. Tout a di été dit, même si rien n'a été dit.

mardi 19 octobre 2010

L'amoureux (6)


J'aurais tellement voulu parler d'amour, de grands sentiments - mais il semble qu'aucune carte n'y soit consacrée. En plus, l'amoureux au singulier, ça peut être une chose bien triste. Mais étrangement, ce n'est que le tarot de Marseille qui lui réserve ce triste sort. Les anglos le font vivre au pluriel...

Enfin, l'amoureux solitaire. Il faut croire que les cartomanciennes n'aimaient pas les histoires qui se terminaient bien.

C'est peut-être pour cette raison qu'elle annonce un choix déterminant pour l'avenir, des hésitations, une situation instable et ambivalente. Attente et désir.

L'attente, tributaire du désir ou de la peur, parce que sans eux elle n'existe pas. C'est une souffrance extrêmement subtile que d'anticiper une chose que l'on craint ou d'espérer une chose que l'on souhaite. C'est parfois lourd d'avoir le coeur en gestation.

Dans sa plus belle forme artistique, l'attente devient le choeur à bouches fermées de l'opéra Madame Butterfly. Abandonnée enceinte et dans la honte par son amant américain quelques années plus tôt, elle apprend son retour imminent. Ce choeur magnifique entonne doucement cet air d'anticipation, un des préférés de ma mère. Un murmure à peine. Elle regarde la mer qui doit lui ramener le père de son enfant et son amoureux. Toute sa joie est contenue. Le chant reste à l'intérieur. Madame Butterfly, c'est une amoureuse bien solitaire!

samedi 16 octobre 2010

A la hauteur de Grand Central Station, je me suis assise et j'ai pleuré (livre # 4)


"Je souris, mais je suis en extase, car pour moi il n'est d'autre réalité que celle de l'amour."

Je passe en trombe à la grande bibliothèque de Montréal trouver un peu de fraîcheur dans cette canicule de juillet et consulter ce livre pour le moins suprenant. Je n'ai qu'une heure avant de rejoindre un ami pour le déjeuner et je me plonge perplexe dans cette prose poétique à priori confuse. Il y sera question d'extase et d'amour. Un propos qui nous lie vous et moi, très chers lecteurs. Je parcours, pour ne pas dire j'engloutis, la moitié du texte de quelque cent pages avant de l'abandonner sur une table pour mon rendez-vous.

"Ce que tu crois être un chant de sirènes pour t'attirer vers un sort funeste, n'est que la voix de l'inévitable pour t'accueillir après une si longue attente. Je t'étais destinée. Des éternités se sont déroulées, des planètes se sont désintégrées et formées pour amener ces deux êtres ensemble."

Je le retouve à la même place après mon déjeuner, qui m'attend. En consultant la note biographique, je comprends mieux le sous-texte. La passion scandaleuse de l'auteure - originaire d'Ottawa - qui dans les années 1940 prend pour amant un homme marié avec lequel elle aura quatre enfants. Je recommence ma lecture avec lenteur cette fois-ci, maintenant que j'ai tout l'après-midi pour la savourer.

"Peut-être suis-je son avenir? Mais, alors, elle est son présent."

Un homme marié partagé entre deux amours. J'en ai rencontré un récemment, comme on croise un inconnu dans un train. Une femme, une amante, des maîtresses. Et moi comme témoin privilégié.

"C'est elle qui fait circuler mon sang, accomplir leur révolution aux étoiles, et revenir les saisons".

C'est, je crois, mon premier drogué de l'amour. L'enivrement et l'euphorie le tiennent au piège, prisonnier d'une passion qui n'est pas aveugle, mais au contraire spectateur presque impuissant du sabotage de sa vie. A chaque coup de coeur, c'est un Kamikaze qui plonge sur Pearl Harbour.

"Jupiter a aimé Leda, me dis-je, et rien désormais ne peut empêcher la guerre de Troie."

A la fin de son récit, une seule question : et l'amour dans tout ça?

"Je peux porter l'amour comme Saint-Christophe. C'est lourd, mais je peux le porter. Ce sont les roches de la suspicion qui me font trébucher."

jeudi 14 octobre 2010

Et une fois de plus, c'est extase et tourments


Je vous avais promis une année sereine et paisible... J'y crois chaque fois. Et plus ma conviction est solidement ancrée, plus la vie s'acharne à me prendre à tort. Quelques semaines, pas même un mois, après avoir résolu de mener une existence presque oisive pendant l'année qui vient, un appel, que je n'attendais pas, cela va de soi dans ce genre de circonstances, m'a éveillée ce matin pour bouleverser ma vie. Je parle de bouleversement, mais cette notion est encore toute cérébrale - c'est-à-dire que je sais que ma vie est bouleversée, mais je n'en saisi pas encore pleinement la portée.

Nous sommes le 27 juillet. Je sais que cette chronique ne paraîtra de façon presque trompeuse dans la section "temps présent" cet automne, mais je ne peux la publier maintenant. J'ai d'une part toute une série sur l'art qui va bon train présentement et d'autre part, j'ai besoin de digérer dans le secret cette étonnante nouvelle.

Lorsque j'ai entrepris des démarches d'adoption à l'été 2009, on m'avait parlé d'une attente de 5 ans ce qui m'avait mis en mode presque de déni. Je préférais ne pas y penser plutôt que de souffrir de l'impatience innévitable qui accompagne l'attente.

En mai 2010, j'apprenais que j'étais 33ième sur la liste, ce qui réduisait considérablement ce délais à moins de deux ans.

Puis ce matin, pour une raison qu'on ne s'explique pas puisque je suis toujours 33ième sur cette fameuse liste, mon contact auprès de l'agence m'apprend que le comité d'assignation est prêt à recevoir mon dossier!

Je serai mère! Je me prépare depuis des années, et pourtant je suis prise de court. Je ne comprends pas encore ce que ça signifie : en terme de temps d'abord (1 mois, 3 mois, 6 mois), pour mon nouvel emploi qui commence la semaine prochaine, pour mes rénovations entreprises au début du mois et qui devaient se prolonger toute l'année, pour les finances qui avaient été plannifiées sur une période d'une autre année. Je sais que tout va se placer - peu importe ce qui arrive. Mais je sais aussi qu'avec cet appel, ma vie ne sera plus la même. Que le plan, une fois de plus, subit le grand sabotage de la vie!

PS. Au moment de publier, j'en saurai probablement davantage qu'aujourd'hui et je lancerai ma série de chroniques sur l'adoption que je préparais depuis peu...

mardi 12 octobre 2010

Le pape (5)


Cinquième carte: le pape. Comme le pape Borghese et sa famille m'ont inspirée la semaine dernière, voyons où celle-ci me mène. On parle d'abord de protection divine, de religion et de sacré. Voilà qui est plus intéressant. La notion de sacralité.

Qu'est-ce qui est sacré en 2010? J'ai très peu réfléchi à la question. Par définition c'est notamment "ce qui a trait à la religion et a pour objet le culte de dieu". Mais le terme peut aussi s'appliquer à des objet païen - comme le boeuf sacré des Indiens. Cet aspect par contre m'intéresse peu.

J'ai repris récemment la pratique régulière du yoga - et c'est ce qui se rapproche le plus du sacré dans ma vie. Comme le veut la philosophie sous-jacente au yoga : "Mon corps est le temple de mon âme"! Voilà pour ma pratique spirituelle! Je privilégie une approche très peu sportive (pour ceux qui sont familier avec le vaste univers du yoga). J'y ai appris une chose aussi banale que respirer - et ça a fait toute la différence.

Cette carte réfère également à la moralité, mais aussi à la bonté et à la miséricorde. Et je me découvre souvent janséniste, rigide moralement comme une hammish. Je suis d'une rigueur morale que j'avoue être probablement immature. Il m'arrive régulièrement de m'offusquer d'une situation - que mon père, en quelques mots qui débutent généralement par "mais, ma petite Eu...", réussit à remettre en perspective.

samedi 9 octobre 2010

Le meurtre de Roger Ackroyd (livre # 3)


"Nous poursuivons notre tâche dans un dessein déterminé, puis, lorsque celui-ci est réalisé, l'effort quotidien nous manque. Croyez bien, monsieur, que mon travail était intéressant. C'était le travail le plus intéressant de la terre. J'étudiais la nature humaine. - Hercule Poirot."

Ah! Agatha Christie! Ma grande passion littéraire de jeunesse. Mon père, qui habitait boulevard St-Joseph coin Boyer à Montréal, nous amenait le samedi matin faire les bouquinnistes de la rue Mont-Royal. Je me choisissais quelques livres - toujours des Agatha Christie - et la fin de semaine, ou la semaine de vacances étaient réglées. J'avais à l'époque 8 ou 9 ans. Si je me souviens, je partageais cette passion avec quelques vieilles tantes, que soudainement je me prenais à estimer davantage en raison de ce goût raffiné que je leur découvrais. L'estime tient parfois à si peu de chose.

Il y a quelques temps, relisant mes premiers journaux intimes, je suis tombée sur un passage qui me laissa perplexe à la première lecture. J'y écrivais que j'aspirais à enseigner la résolution de problèmes à l'Université. Je reconnaissais mon ambition, mais restais dubitative retrospectivement sur mon intérêt si poussé pour les mathématiques (je l'ai développé beaucoup plus tard, me semblait-il). Plus loin, je comprenais qu'il s'agissait en fait de cours portant sur les énigmes des romans d'Agatha Christie. Elle était des mes premières ambitions.

"Les femmes, affirma Poirot, sont merveilleuses; elles inventent et, par miracle, elles ont raison."

jeudi 7 octobre 2010

The scarlet letter


("The scarlet letter", roman de Nathaniel Hawthorne écrit en 1850, raconte l'humiliation publique d'une femme adultère contrainte de coudre un A pourpre sur ses vêtements en témoignage de son péché.)

Je n'ai jamais été de nature prude sur ma vie privée, mais au cours des dernières années, je me suis contrainte à une certaine discrétion - toute relative - sur un aspect pourtant fondamental de mon existence: mon projet d'adoption, comme une que j'aurais tenue grossesse secrète. Je ne serais pas la première.

Au cours des dernières années, je suis devenue mère. Depuis le 28 mai 2010, lorsque j'ai appris que j'étais 33ième sur la liste d'attente du Honduras, un enfant grandit silencieusement dans mon coeur.

Les mois se sont égrénés, rognant lentement la liste d'attente. Maintenant que mon tour approche, je m'expose et j'affiche ma propre lettre écarlate. Mon A, comme dans Adoption.

J'aurais pu consacrer mon blog à cette aventure pour le moins roccambolesque, les émotions intenses et la matière narrative n'ont pas manquées. Pourtant, c'est intérieurement que j'ai choisi de vivre ces aléas.

Force m'a été de reconnaître que j'aurais atteint un public fort restreint dans mon entourage (non pas que mes tourments amoureux, ou mes passions artistiques ne soient d'un intérêt supérieur). J'aurais dû m'adresser à un auditoire nouveau - celui des mères célibataires - auquel je ne me sentais pas encore appartenir et auquel je ne voulais probablement pas me contraindre.

Alors voilà. Une nouvelle chronique est lancée, qui devrait durer les quelques mois qu'il reste à ce processus qui par moments m'a semblé interminable.

mardi 5 octobre 2010

L'empereur (4)


Quatrième carte du jeu: l'empereur. Il incarne la stabilité, c'est préférable pour l'empire - mais on en a connu des moins fiables. S'il y a eu César, il y a aussi eu Néron. Mais bon, la Rome antique pour les cartomanciens ce n'est peut-être pas trop pertinent. Il est un symbole de solidité et de durabilité. C'est Trojan qui me vient en tête - mais ça na rien à voir.

Alors là: protection d'un personne puissante et hautement placée. Le népotisme. Sujet dont je me régale volontiers car le terme rend hommage à un personnage que je ne peux pas blairer: le cardinal Borghese. Un voleur de première pour ceux qui n'auraient pas eu le chance d'en faire la connaissance! Il s'agit de visiter la Gallerie Borghese dans le parc du même nom au centre de Rome pour mesurer l'esprit tordu de ce vil individu qui s'est approprié par les moyens les plus sournois une collection d'art sublime. Et n'allez pas me dire que "la fin justifie les moyens". Dicton nieztchéen s'il en est. Bref, ceci n'expliquant en rien cela, il s'avère que ce cardinal était en fait le neveu du pape - un Borghese également - c'est de famille. Il avait donc le titre particulier de "cardinal-neveu (nipote - en italien)" qui le plaçait légèrement au-dessus de ses collègues. De ses abus de pouvoirs dûs à ses connexions familiales vient le terme "népotisme".

On ne sait jamais par quels détours une simple carte peut nous faire passer...

samedi 2 octobre 2010

La ferme aux animaux (livre # 2)

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"Vous n'allez tout de même pas croire, camarades, que nous, les cochons, agissons par égoïsme, que nous nous attribuons des privilèges. (...) Nous sommes, nous autres, des travailleurs intellectuels. La direction et l'organisation de cette ferme reposent entièrement sur nous. De jour et de nuit nous veillons à votre bien. Et c'est pour votre bien que nous buvons ce lait et mangeons ces pommes."

J'ai eu pendant des années une affiche d'une mise en scène au théâtre de cette oeuvre présentée à l'université Cambridge que j'avais arrachée sur un quelconque babillard lors de mon premier véritable voyage en solitaire. Elle n'avait pourtant rien d'extraordinaire - une photo en noir et blanc d'une tête de porc à l'air sadique.

J'étais dans mes années littéraires et j'avais tendance à collectionner les affiches des pièces du théâtre universitaire. Et Cambridge représentait pour moi un lieux de culte. Dans ma liste de regrets figure quelque part le fait de n'avoir jamais étudié dans une université anglosaxonne.

Comme le disait mon père: "il est difficile d'être père. On croule sous les reproches. Tu ne me pardonneras pas de ne pas avoir financé ton troisième doctorat et ton frère Xavier de l'avoir abandonné". C'est dire l'importance que les études ont pour moi de son avis.

jeudi 30 septembre 2010

Ma lutte avec l'ange


(J'ai aussi pensé intituler cette chronique "fouttez-moi la paix", mais ai craint que ça ne trahisse un quelconque égarement dans mon cheminement vers la sérénité)

Je rends les armes! Je me rends! Je fais une trève dans ma quête pour la sérénité. En me réveillant ce matin, j'avais le sentiment d'avoir lutté avec un ange toute la nuit. Comme dans mon enfance, quand j'argumentais longuement avec dieu pour une bonne note à l'examen. Une négociation mystique intime pour sauver mon âme - à chaque âge sa cause perdue.

Certains fantômes s'acharnent à me hanter. Malgré les efforts déployés pour les éradiquer. Je ne ménage pourtant aucun moyen pour préserver ma quiétude. "Libre de coeur, de corps et d'esprit", tel est ma quête. A chaque fantôme sa technique : je m'éclipse en douce, je romps, je le supplie de m'épargner, je le confronte. Invariablement, je fuis. J'ai même été un jour jusqu'à m'exiler en Europe.

Ils m'ont toujours retrouvée.

Aux petites heures du matin, dans une ville qui n'était pas la mienne, assise à côté d'une inconnue dans un mini-bus. "I think you are a good friend of X? He told me so much about you!" Je ne connaissais pas cette personne. Les émissaires eux, me reconnaissent toujours. Mes fantômes aiment parler de moi à leurs amis et leur raconter toutes sortes de belles choses à mon égard - un phénomène para-normal de leur crû. Je ne réponds jamais; je garde le silence pendant que le fantôme traverse ma vie. A quoi bon prendre un étranger en otage dans ma guerre intérieure.

Pour reprendre l'expression de cette connaissance avec qui je conversais hier: "I surrender"! Je me rends puisque je suis déjà prisonnière.