samedi 31 juillet 2010

Judith et Holofernes, Artemisia Gentileschi


Rare femme dans le monde de la peinture (elle est la première femme à devenir membre de l'académie de dessin de Florence), la décapitation d'Holofernes (1620) - épisode biblique que j'ai découvert dans une toile du Caravage très similaire - est particulièrement poignante lorsque l'on connait le drame de l'artiste.

Lorsqu'elle avait moins de vingt ans, son professeur de dessin la viole à répétiton. Elle le poursuit en cour et est sujette à de nombreuses humiliations. Son agresseur est néanmoins reconnu coupable et condamné à la prison.

J'ai vu cette toile pour la première fois au Palazzo Reale à Milan dans le cadre d'une exposition consacrée au Caravage.

L'épisode raconte comment Judith a séduit le général assyrien afin de sauver le peuple juif. Elle s'est fait admettre dans sa tente et à l'aide d'une épée, lui a trancher la tête... éloge au balbutiement du féminisme!

La violence, la cruauté et la froideur de cette scène soulignent le courage de l'héroine - qui serait au plan symbolique Florence luttant contre la tyrannie.

jeudi 29 juillet 2010

Apollon et Daphnée, Bernini


La Galleria Borghese compte parmi mes musées préférés - probablement mon favori en Italie. Je profite de chaque minute des deux heures qui sont allouées pour visiter la résidence de deux étages. J'y ai découvert notamment la sculpture du Bernin. Son David, le Rapt de Prospérine, Enée et Anchise, et surtout Apollon et Daphné (1622-1625). Les mouvements, les expressions donnent litéralement vie au marbre.

Daphné se mémorphose en Laurier pour fuire Apollon. Dans cette scuplture, on sent tout le mouvement de fuite et pourtant l'écorce monte déjà jusqu'à la hanche de la jeune fille et commence à lui croître dessus, des branches naissent au bout de ses doigts.

Inspiré par un poème d'Ovide, cet épisode raconte que le dieu sentit encore le coeur de la jeune femme battre sous la rudesse de l'écorce.

Le sculpteur n'avait que 24 ans lorsqu'il s'attaqua à cette oeuvre pour le cardinal Borghese. Elle a été créée pour la salle où elle se trouve toujours. Un membre de l'église pouvait justifier la présence d'art païen grâce à une petite phrase gravée dans le marbre : "celui qui aime suivre les formes fugaces du divertissement finit par se retrouver avec des feuilles et des baies amères".!?

mardi 27 juillet 2010

Louise de Keroualle, duchesse de Portsmouth - Pierre Mignard


Toujours mon faible pour les drames de cour.

Louise de Kérouale (1682) était l'une des maîtresses les plus exotiques du roi Charles II. Le roi avait épousé Catherine de Braganza en 1660, une bonne portugaise qui faisait rire la société par son style peu sophistiqué. Elle avait par contre appris à tolérer les nombreuses maîtresses de son mari qui lui donnèrent 14 enfants alors qu'elle était stérile! Quand on parle de karma!

Evidemment, dans le monde merveilleux de la royauté, cette situation provoqua une crise constitutionnelle puisqu'il n'y avait aucun héritier légitime au trône, mais bien des héritiers...

Louise de Kéroualle pour sa part était une aristocrate bretonne de l'entourage de la duchesse d'Orléans, la soeur du roi. Ce ne fut pas sans faciliter les liens avec la France. Sa liaison avec le roi dura 15 ans, jusqu'à la mort du monarque. Ah! Ces rois Anglais!

samedi 24 juillet 2010

Richard III, artiste inconnu


Le portait de Richard III est le point de départ du parcours historique proposé par la National Portrait Gallery de Londres. Elle marque la transition entre le règne des Plantagenets et des Tudors.

Richard III est tué pendant la bataille de Bosworth en 1485, laissant la voie au trône à Henri VII. Cet événement marque la fin de la Guerre des Roses entre les Plantagenets (les descendants du Duc de York), les roses blanches, et les Lancastres, les roses rouges. Pendant près d'un siècle, les deux familles ont lutté pour la succession au trône. Cette bataille fut gagnée par les Lancastre.

Richard était une figure controversée à son époque. Shakespeare en a fait un de ses personnages mythiques. Ayant fait périr ses neveux, les enfants d'Edouard IV, dont il était le tuteur, il régna en despote sur l'Angleterre pendant à peine deux ans.

jeudi 22 juillet 2010

George Villiers, 1st Duke of Buckingham - William Larkin


Ce portait de George Villiers, Duc de Buckingham (1616), une des nombreuses représentations de ce courtisan favori du roi Jacques d'Ecosse (James 1st), introduit la dynastie de Stuarts.

Avec la mort d'Elizabeth I et la fin du règne des Tudors, James descend d'Ecosse pour prendre le pouvoir. Il avait peu d'intérêt dans son image et ne posait pas, contrairement à son "préféré", beau, charismatique et opportuniste.

Il avait un tel ascendant sur le monarque qu'il fut promu en quelques années de maître des chambres au rang de Marquis et amiral - dirigeant pratiquement le pays.

Sur ce portrait, il porte sa robe de l'ordre des Chevaliers de Garter. Il fut assassiné à 36 ans par un officier puritain.

mardi 20 juillet 2010

Elizabeth I, Marcus Gheerarsts the Younger


Ce portrait date de 1592, mais ne m'intéresse pas autant que le musée où il se trouve - le national portrait gallery de Londres qui représente pour moi un énorme Paris Match. Les drames de la monarchies britanniques (parce qu'ils avaient le don d'être sanglants ces Anglais) et les histoires de cour, rien de tel pour me sentir vivre!

Donc, une de mes préférées, Elizabeth I, seconde fille d'Henri VIII (et d'anne Boleyn- guillotinée par son mari), elle succède à sa demi-soeur Marie Tudor (Bloody Mary) la catholique à sa mort. Jamais mariée, elle règne sur une Angleterre au sommet de sa gloire. Elle fait la promotion du commerce maritime, des arts et des lettres (Shakespeare est un des artistes de cette époque), et rétablit les finances du pays.

Elle impose l'anglicanisme. Elle s'aligne avec les pays protestants contre l'Espagne. Elle condamne à mort sa cousine Mary reine des Ecossais.

Elle utilise les portraits pour glorifier son image publique. Ici, elle a une cinquantaine d'années. Il avait été commissionné par Sir Henry Lee, un de ses nombreux et ambitieux courtisans.

Avec elle, meurt la lignée des Tudors.

samedi 17 juillet 2010

Danae, Corrège


Je n'aime pas tellement la Danaë (1530-1532) que son histoire, ou plus précisément son contexte. Je visitais pour la première fois la Galleria Borghese de Rome. En écoutant mon guide, il me semblait que chacune avait été obtenue avec malice, brutalité et égoïsme par le cardinal Borghese qui abusait sans vergogne de sa toute puissance en Italie.

Le Caravage lui avait offert plusieurs de ses toiles pour obtenir une grace papale et pouvoir revenir en Italie (il mourra pendant son retour d'exil). Il fait exécuter des saisis, fait disparaître des toiles des églises pendant la nuit. Aucun scrupule ne semble le freiner dans sa course pour l'art.

Au terme de ma visite, je bouillais de haine pour ce personnage crapuleux. La dernière oeuvre qui s'offrait à moi, suspendue devant le lit à baldaquin du cardinal était cette Danaë.

Et là, elle y était, celle qui lui avait résisté toute sa vie, celle qui lui avait échappé. Et comme pour le narguer dans l'au-delà, s'exhibait maintenant avec toute son indécence devant son lit. La Danaë qui fut vendue, offerte mainte fois. Qui fut l'objet de nombreux propriétaires, qui voyageat dans les cours d'Europe, mais qui ne finit son long parcours qu'une centaine d'années après la mort du cardinal, achetée par ses descendants qui ignoraient tout des démarches désespérées de leur ancêtre.

Cette Danaë, c'est ma douce revanche.

jeudi 15 juillet 2010

Trois grâces, Rubens


Je ne suis pas particulièrement amateure des oeuvres de Peter Paul Rubens, mais comme il célèbre le corps de la femme pour ce qu'il a de plus beau, parce que j'aurais voulu être aimée par un tel homme, je vous présente une de ses toiles. Sa déclaration d'amour à la Femme et à ses femmes - les trois grâces (1635) qui représente à droite Isabel Brandt sa première femme (morte en 1626) et à gauche Hélène Fourment, sa deuxième femme mariée à 16 ans alors qu'il en avait 53.

Elles incarnent trois déesses : Aglaia, Euphrosyne et Thalie, filles de Zeus et d'Eurynome, qui personnifient la beauté, l'harmonie et la joie.

C'est ce que l'on peut appeller une toile "feel good".

Sensualité, exhubérance. Sa femme avait voulu la faire brûler à la mort du peintre parce qu'elle la trouvait indécente (bienqu'elle en était le modèle).

Eloge tardive (parce qu'il peint cette toile dans les dernières années de sa vie) de la beauté féminine dans toute sa splendeur. Merci Rubens!

mardi 13 juillet 2010

Les ambassadeurs, Holbein


Pour le plaisir intellectuel, puisque cette peinture n'aurait probablement pas retenu mon attention autrement. Les ambassadeurs (1533) de Hans Holbein, aujourd'hui exposée à la National Gallery de Londres, était à une certaine époque considérée la plus belle peinture de France (avant sa vente en Angleterre en 1792). Deux ambassadeurs nommés pour assurer les relations entre le pape et le roi Henri VIII. Au regard de l'histoire, on pourrait croire qu'ils n'ont peut-être pas été à la mesure du mandat...

Ce qui retient l'attention des visiteurs, c'est la forme étrange entre les deux hommes. Lorsque l'on se déplace devant cette très grande toile (2 mètres par 2,10 mètres), l'illusion d'optique se révèle. Un crâne se forme progressivement sous le regard du visiteur.

C'est l'une des allusions symboliques à la mort, tout comme la broche de l'un des ambassadeurs et la corde brisée du luth.

samedi 10 juillet 2010

La résurrection, El Greco


J'ai découvert El Greco grâce à Eléonore qui m'avait accompagnée dans ma visite du Prado à Madrid. Les couleurs d'une froideur saisissante, les corps allongés de façon vertigineuse. Tout y était pour me suprendre dans la Résurrection (1600). Spiritualité mystique, anxieuse, tellement loin de la chaleur et de la sensualité méditéranéennes. Les mouvements de danse douloureux des personnages aveuglés par la présence lumineuse du Christ au centre du tableau.

Il y a apparemment dans la laideur quelque chose qui me touche autant que la beauté - l'unicité peut-être, la particularité. Rien de surprenant à ce qu'il ait reçu un mauvais accueil tout au long de sa carrière avec une esthétique aussi peu conformiste.

Il a poussé le manniérisme dans ses retranchements. Il bouleverse son époque. Toledo, près de Madrid, l'adopte et lui donne des commissions. Il y vivra et y créera pendant pendant les 35 dernières années de sa vie.

jeudi 8 juillet 2010

Christ Mort - Mantegna


De Mantegna, si je devais choisir une peinture emblematique, ce serait celle du Christ mort (1501) exposée à la Pinacoteca de Brera, à Milan. Dans les premiers mois de mon séjour dans cette ville, je m'étais fait un devoir de visiter ce musée que je connaissais de réputation. Ma déception fut grande. Il comptait peu de salles et je ne comprenais pas l'intérêt de toutes ces Sainte-Catherine d'Alexandrie et de ces Saint-Sébastien. Lors de cette première visite, je n'ai mesurer que l'ampleur de mon ignorance.

Et c'est ainsi que j'ai plongé dans mon exploration du vaste monde de l'art européen.

Le premier tableau de Brera à avoir obtenu mon affection fut celui de Mantegna, un beau-frère des Bellini.

Original de par le point de vue qu'il adopte, ce tableau est une pièce maîtresse de la Renaissance. Le réalisme provoqua le scandale de l'Eglise.

En homme de son époque, il fit usage des sciences pour faire progresser l'art et pousser les notions de perspective à l'extrême.

mardi 6 juillet 2010

Saint-Jérôme, Caravage


Il me semble que le premier Caravage à entrer dans ma vie fut le Saint Jérome (1605-1606). A ce jour, je ne comprends pas n'avoir jamais entendu son nom ou vu de reproduction de ses oeuvres avant mon séjour en Italie. Il est devenu pendant ces années un de mes peintres phare. Son influence est tellement palpable sur toute son époque.

Une pièce lui est donc consacrée dans la Galeria Borghese. Le Saint-Jérome est la plus calme de ses oeuvres - un équilibre entre la vie et la mort. Une douce lumière sort de l'ombre pour éclairer la robe rouge du saint, toujours en présence d'un crâne dans ses médiations. Son lion n'y est pas. De tous les saint-Jéromes, c'est celui qui me touche le plus. C'est un vieil homme plongé dans ses réflexions qui se trouve devant moi, sans que je le dérange. Contrairement à plusieurs autres versions où ses misères sont davantages exploitées.

Je me suis longuement arrêtée devant cette toile la première fois. Puis j'ai regardé autour de moi les autres peintures de ce même artiste. Un inconnu venait d'entrer dans ma vie.

samedi 3 juillet 2010

Mona Lisa


Très chers lecteurs,


Je ne pouvais pas ne pas en parler: la toile la plus connue au monde. Je l'ai vue pour la première fois à 14 ans, au Louvres évidemment. Et je n'y ai vu que de la banalité. Mona Lisa, ou la Gioconda, (1503-1506) n'a suscité que mon indifférence. Et pourtant bien d'autres oeuvres m'ont bouleversée lors de cette initiation magistrale dans l'univers de l'art européen.

La pauvre, harcelée sans cesse par les touristes, japonnais surtout, qui la prennent en photo malgré les nombreuses contre-indications placardées tout autour, elle ne perd jamais son flegme. Je m'énerverais à moins.

Chant du cygne de Leonardo qui y travailla dans les dernières années de se vie. De Florence, il l'amena avec lui à Milan, Rome, et en France comme on porte une croix.

Napoléon l'avais acquise pour le Louvres avant qu'elle ne fusse (subjonctif imparfait - je le savoure au passage) volée et ramenée en Italie quelques années plus tard. On ignore tout du modèle - l'épouse d'un banquier florentin ou d'une courtisane des Medicis. Sourire énigmatique oh! combien étudié par les spécialistes...

jeudi 1 juillet 2010

La saison estivale d'Extase et tourments


Pendant la période estivale, votre humble blogueuse a choisi de publier selon l'horaire habituel, une sélection de chroniques sur les arts visuels. Vous questionnerez peut-être ce choix intellectuellement aride à priori pour les mois chauds de l'été, mais détrompez-vous. Je ne pars jamais à Cuba sans une brique sur l'iconographie du quatro cento italien. Rien de tel pour profiter paisiblement de la plage et éloigner le moron. J'apprends davantage sur les divers attributs de Catherine d'Alexandrie en me laissant bercer au doux bruissemet des vagues.

En ce premier juillet, une toile du groupe des Sept, que j'ai découvert sur le tard. J'ai pris pleinement conscience de ce groupe lorsque je me trouvais à Milan et c'est seulement lors de mon retour à Ottawa il y a quelques années que j'ai pu apprécier ces peintres - au musée des beaux-arts du Canada qui se trouve juste au bout de la rue où je vivais à l'époque.

J'ai choisi une oeuvre de Tom Thomson (qui n'a même pas fait partie du groupe puisqu'il est décédé avant sa création). Le Pin. Ca aurait pu en être une autre. Ce qui est étrange avec les toiles de ce groupe, c'est qu'autant elles me plaisent, autant elles peuvent m'irriter pour des raisons superficielles comme les tonalités de rose et de lilas - qui pourtant chez d'autres artistes ne me dérangent pas (bienque je puisse dire la même chose des verts de Degas).

Ils ne sont que très peu connus hors de nos frontières. Une forme de terroire méprisé des Européens. Je me revois aborder naïvement ce sujet avec des experts d'histoire de l'art italiens qui se demandaient bien de quoi je voulais parler... Mais ne terminons pas sur une note aussi pessimistes. Si vous venez me rendre visite, je vous promets de vous accompagner voir ces toiles au musée. Elles valent bien ce petit détour!